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7 août 2014

Halo : Waypoint - Créations conservés - Fanfictions - Revanche à Tulsa


PROLOGUE

2012 heures, 27 novembre 2525 (Calendrier Militaire)/ Vaisseau du CSNU Commonwealth en orbite autour de Chi Ceti 4.

John observait les nombreux débris du vaisseau ennemi depuis la baie d’observation du pont de commandement du Commonwealth. Les plaques de blindages scintillantes de ce qui était, il y a encore trente minutes, une frégate covenant dérivaient lentement dans l’infini de l’espace avec une lenteur qui contrastait avec la violence de l’explosion. Les débris issus de la partie du vaisseau d’où avait explosé la bombe nucléaire était encore rougeoyants, mais aucun n’était entré en fusion grâce au froid absolu de l’espace dans lequel ils se trouvaient désormais, dénués de bouclier de protection.

C’était en même temps une grande victoire et une grande défaite auxquelles John-117 et ses combattantsspartans avaient participé aujourd’hui. Une grande victoire parce que c’était la première fois qu’un vaisseau covenant était détruit, et une grande défaite par ce qu’ils avaient perdu l’un d’entre eux. Sam s’était sacrifié pour la mission, pour leur survie, pour l’Humanité. Il savait que cela pouvait arriver. Peut-être n’y était-il pas préparé, mais il avait réussi. Sa mort avait permis de montrer que les covenants n’étaient pas invincibles, qu’ils pouvaient être vaincus. John espérait juste que le prix à payer ne serait pas toujours aussi élevé.

- Au rapport, adjudant, fit le capitaine Wallace.

- Les seuls membres de mon équipe qui ont réussi à rejoindre le point d’entré furent les spartans 034, 087 et moi-même. Nous avons pénétré le vaisseau afin de collecter des renseignements, et avons rencontré la race extraterrestre que vous voyez ici.

L’adjudant désigna alors l’écran principal du pont de commandement, qui affichait les images enregistrées par les caméras embarquées de son armure et de celle de Kelly. La lecture était stoppée sur l’image de la créature à tête de vautour qui avait troué l’armure de Sam, et qui l’avait condamné à son triste destin. L’adjudant regretta silencieusement mille fois de n’avoir pas vu l’extraterrestre lui tirer dessus…

- Et c’est ainsi que vous avez dût abandonner l’un de vos hommes ? continua Wallace.

- Le spartan 034 s’est interposé pour me protéger d’un tir de plasma concentré, qui a intégralement troué sa combinaison de combat. Dans cet état, il n’aurait pas put sortir du vaisseau, car la décompression l’aurait tué, et nous n’avions rien sur place pour réparer son armure. Il a lui-même activé les têtes nucléaires Anvil II et est resté pour permettre au spartan 087 et à moi-même de quitter le vaisseau ennemi à temps.

Le visage du capitaine était barré d’une expression de mécontentement.

- Il a donc décidé de son propre chef de rester ?

- Non. Je lui en ait donné l’ordre, et il a obtempéré.

Wallace se retourna alors vers la baie d’observation, et contempla longuement les débris du bâtiment covenant en s’agrippant à la barre de commandement. Enfin, il baissa la tête, et lâcha sincèrement sans se retourner :

- Je compatie pour la disparition de votre homme. Vous pouvez disposer.

John se mit au garde-à-vous, mais son geste fut si zélé et si mécanique qu’il faillit briser ses doigts sur son casque de combat, son geste étant amplifié par son armure dont il ne mesurait pas encore toutes les capacités. Corrigeant son mouvement comme il le put, il attendit un instant avant de faire demi-tour pour quitter la passerelle de commandement. Il voulait voir ses troupes, désormais, pour savoir comment ils réagissaient à la disparition de Sam.

Accédant à l’ordinateur incorporé à son armure via son casque, il afficha la liste des spartans. Mentalement, il ordonna à l’ordinateur d’écrire la mention « porté disparu » à côté du nom de Sam, conformément à la directive Neuf-Trois-Zéro de la Section Deux du SRN. L’annonce de la mort d’un spartan ne pouvait être divulguée, car l’espoir et l’impression d’invincibilité qu’ils inspiraient au reste des forces du CSNU aurait immédiatement fondu comme neige au soleil. Les spartans ne pouvaient pas officiellement mourir.

Mais alors qu’il se retournait, il remarqua le docteur Halsey qui avait assisté silencieusement à l’interrogatoire, et se dirigea vers elle :

- Docteur, fit-il sans aucune émotion dans la voix. J’ai quelque chose pour vous.

Il saisit alors le morceau de métal brillant que portait l’un des extraterrestres au bras, ainsi que le pistolet à plasma récupéré sur son cadavre, et les lui tendis :

- Je pense que cela pourrait vous intéresser. Voici l’arme qu’utilisaient nos adversaires, ainsi que l’objet générant leurs boucliers de protection. Cependant, ce dernier semble ne plus fonctionner ; je ne sais pas s’il vous sera utile.

- Bon travail, adjudant. Je suis désolé pour Sam…

- Ce n’est pas de votre faute, docteur. C’est moi qui ai fait une erreur.

- Ne vous blâmez pas inutilement, John.

L’adjudant ne répondit pas, et inclina simplement la tête avant de se diriger vers la sortie à pas lent. Le docteur Halsey le regarda s’en aller, le doute cernant ses yeux. John lui semblait avoir subit un important choc émotionnel, ce qui pourrait influer sur ses capacités à diriger ses troupes. Elle espéra un instant qu’il ne lui faudrait pas le remplacer… avant de faire confiance à John pour qu’il se ressaisisse rapidement.

_________________________
La section des dortoirs du Commonwealth attribuée aux spartans, qui étaient impeccablement rangée avant l’attaque, contenait désormais une immense quantité de matériel spécial qui avait envahi la moitié de l’espace. La plupart étaient du matériel pour les armures MJOLNIR, des pièces de rechange, et des appareils servant à les monter et à les démonter sur les spartans. La plupart d’entre eux étaient déjà en train d’étudier les plans des armures, leurs caractéristiques, ainsi que la manière de s’en équiper. Bien que tous aient réussi à les retirer, il y avait eut apparemment plusieurs accros pour certains, aux vues des pièces bosselées amoncelées dans un coin qui avait dût être retirer à la manière forte.

Lorsque John pénétra dans les dortoirs, ses spartans se mirent immédiatement au garde-à-vous. Le fait qu’il portât encore sa propre armure renforçait en cet instant l’impression de puissance qu’il dégageait. Pourtant derrière la visière opaque de son casque, le regard de l’adjudant était confus. Il ne savait pas encore comment aborder la disparition de Sam aux autres, même s’ils étaient déjà tous au courrant. Il devait dire quelque chose, mais ses pensées étaient brouillées. Ce discourt lui sembla être comme chaque combat qu’il avait vécu, et il décida de l’affronté comme tel, avec sa méthode : l’improvisation pure.

- Repos, commença-t-il.

Les spartans cessèrent de se raidirent, et adoptèrent une posture plus décontractée, mais leurs visages étaient encore froids, voir anxieux pour certains. John fit le tour des dortoirs du regard, dévisageant chacun de ces hommes et femmes qu’il commandait. Ces soldats qu’il lui faudrait peut-être envoyer à la mort, tout comme Sam. La simple idée d’abandonner un seul d’entre eux lui était insupportable, mais il avait conscience que c’était son devoir, et que le devoir était la première qualité des spartans.

- Aujourd’hui ne fut pas un jour comme les autres, continua-t-il. Pour la première fois depuis longtemps, nous avons perdu l’un des nôtres. Mais sa mort ne doit pas nous faire douter de nous-même. Notre nouvel adversaire a appris aujourd’hui, grâce au sacrifice de Sam, que nous pouvions le vaincre. Il apprendra à nous craindre. Nous, spartans, montreront aux covenants que l’Humanité n’est pas faible, que nous pouvons lutter. Nous porterons la guerre au plus loin que nous le pourrons, bien plus loin que nos ennemis ne l’aurait souhaité, et nous triompherons. La perte de l’un des nôtres ne doit pas nous accabler, mais nous rendre plus fort. Nous attendrons notre heure, et alors nous vengerons Sam. Les covenants payeront sa mort, et ils le payeront au prix fort.

CHAPITRE PREMIER


0640 heures, 5 décembre 2525 (Calendrier Militaire)/ Centre Bravo-6 du Haut Commandement du CSNU, Sydney, Australie, Terre.

Les portes de l’ascenseur bardé de capteurs s’ouvrirent lentement pour laisser passer le vice-amiral Stanforth, qui pénétra alors dans le long couloir précédant la salle du Conseil de Sécurité du CSNU, protégé par trois kilomètres de roches, de béton armé, de plaques de titane A et d’acier trempé anti-impulsion électromagnétique. Il ne prit pas la peine de contempler les tableaux illustrant les plus grandes victoires de l’Humanité, et marcha d’un pas rapide vers la double-porte devant lui, qu’un couple de MP ouvrit avant de se mettre au garde-à-vous.

La pièce était à moitié plongée dans l’obscurité, chose qu’appréciait les huiles du SRN, et qui irritait profondément la plupart des autres officiers. Mais aucun membre du conseil de sécurité n’appartenait pas au SNR, ce qui était en même temps rassurant et angoissant, cela dépendait du grade que l’on possédait. Le vice-amiral se sentait lui-même particulièrement en sécurité dans cette salle, et la présence de l’amiral Sir Terrence Hood, du vice-amiral Whitcomb, du général de division Nicolas Strauss et du colonel Ackerson ne l’inquiétait nullement. C’était une chose rare que le conseil de sécurité soit au complet, mais la situation actuelle avait amplement favorisé cette réunion. Stanforth pris place dans son fauteuil habituel, et attendit que l’un de ses confrères ne débute la séance :

- Bien, fit l’amiral Hood. Puisque nous sommes enfin tous là, nous pouvons commencer. Comme vous le savez tous, il y a maintenant dix jours, un vaisseau covenant est apparu en orbite au-dessus de Chi-Ceti 4, où se trouve notre centre de test secret, le complexe Damascus. Une heure après son apparition dans le système, ce vaisseau fut détruit par l’explosion d’une tête nucléaire à l’intérieur même de sa coque. Cette arme a été amenée jusque là par l’action courageuse du groupe de combat Spartan-II…

Stanforth surprit une maigre grimace de frustration sur le visage d’Ackerson.

« … qui a perdu l’un de ses hommes dans l’action.

La grimace se transforma subitement en un sourire à peine discret.

« Trente-trois heures plus tard, continua Lord Hood, une flotte composée d’une vingtaine de vaisseaux ennemis est apparue dans le système. Nous avons de bonnes raisons pour penser que la colonie de Chi-Ceti 4 n’existe plus depuis. Heureusement, nous avons eut le temps d’évacuer la planète, et ainsi de sauver le précieux contenu du centre Damascus.

L’amiral s’arrêta là un instant, évaluant lentement chacun des membres du conseil. Son regard était pénétrant, comme deux obus de CAM, mais discret. Son âge avancé lui avait suffisamment appris qu’on faisait nettement plus peur en étant d’un calme imperturbable qu’en étant agressif. Après une étude complète de ses confrères, il entra dans le vif du sujet :

- Malheureusement, avant de pulvériser la planète, ils ont pris la peine de faire un peu de collecte de renseignement. L’un de nos croiseurs resté en arrière pour observer la réaction ennemie à la perte d’un de leur bâtiment nous a rapporté ses images, captées par l’un de ses drones-espions.

Un écran caché dans la pénombre de la salle s’illumina brusquement, montrant une image orbitale de Chi-Ceti 4. Lord Hood la commenta calmement :

- Voici l’image de la planète une seconde avant l’arrivé des covenants. Et voici celle prise une seconde après.

Une nouvelle image illumina l’écran. Elle était à peu près identique à la première, sauf que désormais, à peine mille deux cent kilomètres au-dessus de la surface, se trouvait une vingtaine de vaisseaux covenants. L’indicateur de temps montrait clairement un délai d’à peine deux secondes entre les deux clichés.

- Comme vous pouvez le voir, continua l’amiral, leurs vaisseaux sont sortis du sous-espace en formation d’attaque parfaite, n’étant séparés que de quelques centaines de mètres à peine les uns des autres, et à une distance incroyablement proche de la planète. Cela nous prouve une nouvelle fois la nette supériorité de leur technologie, qui leur permet de faire des sauts d’une précision phénoménale par rapport à nos propres vaisseaux. Mais ce n’est pas la chose la plus inquiétante : immédiatement après avoir pénétré dans le système, les covenants ont fait mouvement. Voici l’image prise trente minutes après leur arrivé.

La troisième image remplaça la vision terrifiante des coques brillantes. Mais elle était identique à la première, la surface de la planète étant la seule chose observable.

- Apparemment, fit Lord Hood, on pourrait croire qu’ils ont quitté le système. Seulement, si on zoom sur la surface de la planète…

L’image avança, zoomant sur une partie précise de Chi-Ceti 4. Au début, on ne voyait rien. Mais peu à peu, la forme agressive d’un vaisseau covenant apparut.

- … on peut voir qu’ils ont en fait effectué un débarquement massif. Vu leur niveau technologique, il est exclu qu’ils n’aient pas détecté l’absence totale d’activité, et nous pensons qu’ils ont en fait débarqué pour collecter des informations. Heureusement pour nous, l’amiral Preston Cole qui commandait la flotte ayant effectué l’évacuation avait ordonné la destruction de toute donnée concernant les coordonnées planétaires de nos colonies et de la Terre. Trois heures après leur débarquement, les vaisseaux ont regagné la haute atmosphère et ont bombardé la planète à l’aide d’arme à plasma d’une grande puissance de destruction, vitrifiant totalement la surface. La question du jour, messieurs, c’est comment devons-nous réagir ?

Un silence de cimetière envahi soudain la salle. Les membres du conseil regardaient tous dans le vide, comme croyant y trouver une solution à l’épineuse situation dans laquelle ces foutus covenants les plongeaient. Le SNR savait que les covenants devaient nous observer depuis un certain temps, mais il était surtout question d’interception de transmissions longue distance, pas de collecte de renseignement directement à la surface d’une colonie. Il était clair qu’ils souhaitaient mieux connaître leur adversaire, tout comme le CSNU souhaitait mieux les connaître.

- Avons-nous récupéré des pièces d’intérêt dan les débris du vaisseau covenant détruit ? commença le généra Strauss. Y a-t-il quelque chose qui puisse mieux nous renseigner sur leur technologie ?

- Négatif, répondit Lord Hood. La déflagration nucléaire a été contenue à l’intérieur de leur bouclier de protection, ce qui a décuplé les dégâts, tout comme les ondes électromagnétiques qui ont désactivé tous les composants électriques du vaisseau ennemi. Par contre, les spartans ont réussi à récupérer plusieurs équipements pris sur les cadavres ennemis. Ces objets sont actuellement étudiés par la Section Trois.

- Amiral, intervint le colonel Ackerson d’un ton qui était tout sauf calme. Avec tout le respect que je dois au travail du docteur Halsey, je ne pense pas qu’elle soit la meilleure personne à qui confier ces objets.

- Le docteur Halsey a des projets pour ses spartans, colonel, répliqua Lord Hood. Et je ne vois pas pourquoi je priverais ces combattants de tels avantages. Autre chose ?

Ackerson se tut, mais son visage était devenu maussade, presque agressif. Le différent qui l’opposait au docteur Halsey était bien connu du SNR, leurs deux sections se disputant continuellement pour obtenir les crédits nécessaires à leurs projets. Jusque là, les spartans avaient amplement satisfait le CSNU. Partout on entendait des éloges à leur sujet, ce qui avait pour effet d’exaspérer Ackerson. Il encaissa cette nouvelle humiliation, et resta silencieux.

- Et si nous leur tendions un piège ? proposa Whitcom.

- Quel genre de piège ? demanda Lord Hood, très intéressé.

- Si, comme vous nous l’avez dit, les covenants recherchent des informations sur notre empire, nous pourrions les appâter facilement vers une colonie mineure. Nous ferions évacuer la planète, et donnerions « involontairement » ses coordonnées aux covenants, l’indiquant comme un important centre de recherche. Les spartans, ainsi qu’une importante force de contre-attaque, seront cachés dans des abris souterrains, et attendront que l’ennemi pose le pied sur la surface. Dans le même temps, nous préparons une contre-attaque spatiale pour les empêcher de vitrifier nos forces terrestres lorsqu’ils auront découvert le subterfuge.

- Et vous croyez que nous pourrions repousser leurs forces ? continua l’amiral.

- Je ne compte pas sur notre flotte pour les vaincre, mais sur la leur.

- Expliquez-vous, s’impatienta le vice-amiral Stanforth. Cessez de parler par énigme. Quel est votre plan ?

- Mon plan est d’user de l’effet de surprise, ainsi que la capacité bien connue des spartans à effectuer des opérations d’infiltration, afin de nous emparer de l’un de leurs croiseurs. Cela pourrait nous fournir bien plus de renseignement que nous ne pourrions jamais en rêver sur leur technologie, et peut-être même sur leur monde d’origine.

Un nouveau silence envahi la salle. Mais cette fois-ci, ce n’était pas l’impuissance qui se lisait sur les visages des officiers, mais de l’espoir. Pour la première fois, l’Humanité avait une chance d’attaquer, de porter un grand coup aux covenants. Si cette opération marchait, la guerre pouvait être gagnée rapidement. L’accès à la technologie d’arme et de protection covenant pourrait rendre la flotte du CSNU aussi meurtrière que celle de ces incompréhensibles aliens.

- Et quelle colonie avez-vous l’intention de sacrifier pour une telle opération ? questionna le général Strauss.

Le vice-amiral Withcomb s’avança alors vers l’écran principal de la salle, et activa la carte interstellaire holographique, qui regroupait l’intégralité des mondes colonisés par le CSNU. Il n’y eut aucune hésitation lorsqu’il désigna une petite planète isolée, située dans la bordure occidentale de la galaxie :

- Nous les surprendrons à Tulsa.

CHAPITRE DEUX

1023 heures, 7 décembre 2525 (Calendrier militaire), centre d’entraînement de la section S-II, Reach.

John sauta par-dessus le mur de défense à moitié détruit en délivrant un feu nourris de son fusil mitrailleur MA5B sur les cibles situées à cent mètres plus loin. Utilisant l’énergie cinétique de sa réception au sol comme un ressort, il effectua un bond de côté sans cesser de tirer, afin de se mettre à couvert derrière un piège à char. Alors qu’il changeait l’énorme chargeur de 60 balles de 7,62 mm de son arme, il activa sa liaison com :

- Deuxième équipe ! Go !

Kelly, Tan et Li traversèrent à leur tour le mur de défense tandis que John attirait l’attention des tourelles automatisées du bunker cible. Lorsqu’ils furent tous à couvert, l’adjudant poursuivit avec la suite du plan :

- Mur de grenade dans trois, deux, un, dégoupillez !

Quatre goupilles furent arrachées à leur mères porteuses, qui s’envolèrent vers les tourelles, pour atterrir trois mètres à peine devant elles. L’explosion simultanée des explosifs projeta dans les airs une importante quantité de poussière, masquant totalement la vue. Cela permit aux spartans d’avancer jusqu’au bunker pour lâcher une deuxième fournée de repas chauds, qui explosèrent les tourelles comme du carton.

Cet entraînement devenait trop facile, surtout avec les nouvelles armures. Les spartans pouvaient désormais sauter au-dessus d’un mur de trois mètres, chuter d’une hauteur phénoménale sans aucun dommage, et leur force et leurs réflexes étaient devenus plus que surhumains. Deux d’entre eux avaient en particulier bénéficier énormément de ces nouvelles modifications : Linda et Kelly. Tandis que la première pouvait parfaitement contrôler le moindre de ses mouvements sans jamais trembler et avait acquis une précision double de ce qu’elle était auparavant, la seconde était devenue d’une rapidité telle que personne n’arrivait plus à la toucher si elle ne le voulait pas, faisant preuve d’une rapidité et de réflexes incroyables.

John se demandait comment il devait modifier le parcourt d’entraînement pour l’adapter aux nouvelles capacités de son groupe de combat… lorsque sa liaison com grésilla, et la voix familière du docteur Halsey se fit entendre dans les haut-parleurs de son casque :

- Adjudant ? L’entraînement est terminé. Rendez-vous à la salle de briefing avec vos hommes dans cinq minutes.

- Nous y serons dans deux minutes, madame, répliqua John.

La salle de briefing était tout ce qu’il y avait de plus austère : entièrement d’un gris métallique, avec pour seul ameublement un écran géant escorté d’une console, et une trentaine de sièges. Cette dernière partie de la pièce avait été récemment renforcée par des plaques de blindage et un meilleur ancrage dans le sol afin de pouvoir supporter le poids des armures des spartans. Ceux-ci restèrent debout jusqu’à ce que le docteur Halsey leur autorise de s’asseoir. John remarqua la présence discrète de Déjà, dont l’image holographique flottait légèrement au-dessus de la console aux côtés de la femme en blouse blanche.

- Bonjour à tous, fit le docteur Halsey. Nous venons de recevoir de nouveaux ordres de la part du Haut Commandement. Il semblerait que l’on ait remarqué vos exploits sur Chi Ceti 4, et on souhaite vous confier une mission de la plus haute importance.

« Un vaisseau espion nous a rapporté que lorsque les covenants sont arrivés en masse pour détruire Chi-Ceti 4, ils ont d’abord effectué un débarquement terrestre pour collecter des informations, principalement les coordonnées d’autres planètes. Et le Haut Commandement a décidé d’utiliser leur curiosité à notre avantage.

« Au moment même où je vous parle, le CSNU est en train de faire évacuer la colonie de Tulsa du système Fedarix, en vue de donner « accidentellement » ses coordonnées aux covenants, et en l’indiquant comme un important chantier naval. La planète sera truffée de troupes combattantes, qui attendront dans des bunkers souterrains que l’ennemi touche le sol.

« Votre mission sera d’aborder l’un des croiseurs ennemis et de vous en emparer, en éliminant toute menace à l’intérieur. Vous aurez tout le soutient disponible pour cette opération, et travaillerez en collaboration avec les marines et les TCAO pour un maximum d’efficacité. Vous devrez prendre ce vaisseau intact, afin que nous puissions étudier la technologie qui le constitue, ce qui implique une action rapide et efficace. Il ne pourra y avoir qu’une seule tentative, car la bataille risque d’être trop difficile pour se permettre de faire un deuxième essaie. Dès que vous aurez réussi, vous devrez quitter le système avec le vaisseau ennemi, semer les éventuels poursuivants, avant de rejoindre Reach. Des questions ?

John leva immédiatement la main.

- Comment serons-nous sûr que l’ennemi ne tentera pas de vitrifier la planète lorsque nous attaquerons ?

- Une flotte d’attaque constituée d’une centaine de vaisseaux du CSNU se rassemble actuellement à proximité du système Fedarix, et engagera la flotte ennemie dès que vous serez à bord de l’un de leurs croiseurs, afin de les occuper et de vous donner un surplus de discrétion.

- Et si nos propres croiseurs tiraient sur le vaisseau que nous aurions abordé ?

- Vous serez équipés de désignateurs lasers, afin de marquer le vaisseau abordé pour que la flotte du CSNU sache quelle est votre cible. Ils ne tireront dessus que pour se défendre, mais feront tout pour ne pas l’endommager.

- Combien de temps aurons-nous pour pénétrer dans le vaisseau ?

- D’après les observations sur Chi-Ceti 4, les covenants sont restés trois heures entières au sol. Nous pensons pouvoir créer suffisamment de fausses installations militaires et scientifiques sécurisées avant le début des opérations pour pouvoir les retenir une heure de plus. Ensuite, les troupes de contre-attaque devraient leur causer pas mal de problèmes. La suite de la bataille dépendra de vous.

Le docteur Halsey contempla la trentaine de spartans en armure qui n’attendaient que le moment de partir au combat, de porter la guerre chez l’ennemi et de vaincre. C’était l’aboutissement de tous ces projets, excepté l’un d’eux, et elle en était extrêmement fière. Ils pouvaient accomplir cette mission ; ça, elle en était sûre. Rien n’avait put les maintenir en échec, et ils allaient devoir confirmer leur efficacité une fois de plus, cette fois en frappant les covenants les premiers.

CHAPITRE TROIS

1147 heures, 21 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat Teflor, périphérie du système Fedarix.

Le capitaine Yan Haric regardait pensivement la puissante flotte qui s’agglutinait lentement dans ce coin perdu de l’espace, réfléchissant sur leurs chances de victoire. Il y avait là plusieurs dizaines de frégates de combat, ainsi que trente croiseurs d’attaque et une vingtaine de puissants destroyers. Le tout constituait une puissance de feu considérable, plus offensive que défensive, car peu de ces vaisseaux pourraient encaisser plus de deux ou trois tirs de torpilles à plasma covenants.

Le croiseur que commandait le jeune capitaine, le Teflor, était un exemple de robustesse et de capacité offensive. Equipé de moteurs à réaction tri-core lui donnant une vitesse étonnante pour un bâtiment de son tonnage, il possédait trente tubes lance-missiles, deux canons CAM et un petit trio de têtes nucléaires en réserve pour les pires situations… ou aussi pour auto-détruire son vaisseau si la situation l’exigeait. Sa coque de titane A faisait trois mètres d’épaisseur et ses nombreuses sections isolables lui permettaient d’encaisser bien plus de tirs que la plupart des autres croiseurs. En fait, sa seule faiblesse était son manque de manœuvrabilité qui l’obligeait à des mouvements simples et directs. Mais le capitaine Haric n’avait jamais été un partisan des manœuvres complexes, et préférait affronter ses ennemis de face plutôt que de s’en remettre à une quelconque pirouette spatiale pour prendre le dessus.

Seulement, cette énorme concentration de force ne pouvait que prouver que la bataille vers laquelle ils allaient se diriger très prochainement n’allait pas être une partie de plaisir. La plupart des affrontements spatiaux contre les covenants avaient rarement dépassé le résultat de carnage total. Certes, il y avait eut quelques victoires, mais à chaque fois les pertes du CSNU étaient grandes, et les effectifs mis en œuvre pour vaincre devaient toujours être au moins trois fois supérieure à ceux de l’ennemi pour avoir la moindre chance. Combien de vaisseaux covenants allaient-ils affronter ? Comment être sûr que le piège allait fonctionner ? Et qui leur disait que les covenants n’allaient pas leur tendre eux-même un piège ?

Seulement, Yan Haric savait que l’issue de cette bataille ne dépendrait pas de la flotte. Il le savait parce que c’était son propre vaisseau qui avait conduit les spartans jusqu’à Tulsa pour les y déposer. Les autres vaisseaux savaient que l’objectif n’était pas seulement de porter un grand coup aux covenants, mais ils ignoraient totalement qui allait effectuer l’abordage. Evidemment, le nom des spartans se lisait sur presque toutes les lèvres, mais le SRN préférait garder l’information secrète, et cela pour des raisons toutes aussi secrètes.

Cet affrontement devrait être rapide ; ça, c’était sûr. Et le capitaine Haric ferait tout pour aider les spartans dans leur mission, afin qu’il puisse sortir rapidement de la boucherie qui commencerait très bientôt.

Dans leur abri renforcé et éléctro-magnétiquement isolé, les spartans préparaient leur équipement. Cette mission étant d’une importance capitale, on leur avait tout fourni sur commande. Evidemment, les explosifs étaient en quantité réduite, afin d’éviter d’endommager le vaisseau abordé, et les munitions n’étaient pas d’un calibre trop important, sauf pour les snipers. Par contre, les équipements de neutralisation tels que les grenades étourdissantes ou les munitions tranquillisantes pour capturer des prisonniers covenants remplissait une bonne partie des paquetages des spartans.

John était en train de vérifier le canon de son fusil mitrailleur lorsque Kelly s’approcha de lui, tenant une feuille de papier qu’elle lui tendit.

- Le PC nous a transmit une communication crypté de la part de FLEETCOM.

John pris la feuille et la parcoura des yeux :


Ordre Prioritaire d’Urgence du Commandement Spatial des Nations Unis 081636R-5

Code de cryptage : rouge
Clé publique : transmission / accès Alpha sécurisé
De : FLEETCOM
A : projet S-II, Section Trois
Objet : début des opérations
Classification : TOP SECRET (Directive CTS)
/début de transmission/

Spartans,
Nous avons confirmation que le message leurre a bien été intercepté par l’ennemi, et qu’une flotte covenant est en route vers votre position. Nous ignorons encore le nombre de vaisseaux ennemis, leur formation étant trop serrée pour les discerner dans l’espace Shaw-Fujikawa, mais notre flotte de contre-attaque est prête à toutes les éventualités. Ils attendront votre signal pour entrer dans le système, et mettrons trente minutes à partir de ce moment pour rejoindre Tulsa. L’arrivée ennemie a été calculée par nos IA pour 3583 heures, et leur descente dans l’atmosphère devrait mettre vingt minutes, ce qui vous laissera le temps de calculer leur points d’arrivé et de déterminer quelle cible vous sera la plus accessible.

Vous avez pour directive de choisir le vaisseau le plus puissant possible, dans la limite du possible avec le temps et les moyens qui seront à votre disposition. Avant le début de la capture, marquez la cible au laser pour éviter qu’elle ne soit prise pour cible par notre flotte, et effectuer l’infiltration. Le choix de la méthode à employer vous est laissé, tant que la cible reste en bon état. Une fois la capture effectuée et toute présence ennemie éliminé à l’intérieur la cible, vous rejoindrez le point de rendez-vous avec la flotte, et effectuerez un saut vers le système Donaba, avant de rejoindre Reach. Si jamais la mission était compromise, que la cible était rendue inutilisable, où que la capture est un échec, vous avez pour ordre de demander une évacuation immédiate. Votre groupe sera mis à l’abris aussi rapidement que possible par la flotte.

Bonne chance, soldat.

/fin de transmission/



Ces nouvelles étaient plutôt bonnes : l’ennemi avait mordu à l’hameçon, et l’heure de son arrivée leur était connu, tout comme la fenêtre de temps qu’ils avaient à disposition pour la première phase (et sans doute la plus dur) de leur mission. John rendit la feuille à Kelly en disant :

- Fait-le passer à toute l’escouade. Quand tout le monde l’aura lu, préviens-moi.

- Compris, fit la spartan.

Elle s’éloigna et laissa John seul pour réfléchir. Bien sûr, il avait déjà préparé un plan pour cette mission, mais ce plan se heurtait à trop d’inconnu : ils ne connaissaient encore rien du nombre de vaisseaux ennemis, des endroits où ils décideraient d’atterrir, ni de la technologie qu’ils allaient affronter à l’extérieur et à l’intérieur du vaisseau. Le géni militaire du CSNU avait cependant aménagé un réseau ferroviaire souterrain très développé : depuis cet abri, les spartans n’avaient qu’à monter dans le train stationné juste à côté pour pouvoir atteindre n’importe quel zone clé dans un périmètre de huit cent kilomètres carré, dans un temps maximal de quatre-vingt minutes. Les généraux de la flotte avaient également identifié les différents endroits où une frégate ou un croiseur pourrait atterrir à la surface de Tulsa, et avait transmis aux spartans la localisation de chacun de ces points de chutes, sur une carte présentant également le réseau de transport qu’ils allaient devoir utiliser.

Dès que les covenants entreront dans le système, tout devra être fait le plus vite possible, John le savait. La précision la plus chirurgicale devra être apportée pour éviter d’augmenter le risque d’accros, ce qui ne sera pas aisé vu le nombre de facteurs inconnus pouvant entrer en compte. John prenait un peu plus conscience à chaque seconde que ce sera plus durant l’opération que le plan allait s’élaborer, et que les préparations devaient être essentiellement matérielles. Reprenant la vérification du canon de son fusil, il attendit l’heure de la revanche.

Lorsque Kelly revint le voir, elle n’eut pas besoin de lui dire pourquoi, et il se leva de sa chaise renforcée en laissant les pièces démontées de son fusil sur la table. En voyant leur adjudant se relever lentement, les autres spartans se turent, et attendirent de savoir se qu’il allait faire.

- Spartans, déclara John. Comme vous avez put le voir, nos ennemis viennent à nous. Bientôt ils tomberons dans notre piège, en nous livrant l’un de leurs vaisseaux. Mais cette mission ne sera pas facile, et nous devrons rester constamment en alerte pour palier à toute éventualité. Nous ignorons encore trop de choses de nos ennemis, et c’est pour changer cela que cette opération a été lancée. La rapidité sera notre meilleur atout, et il n’y aura pas de place pour l’hésitation jusqu’à la fin de notre mission. Alors soyez prêts !

CHAPITRE QUATRE

1153 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Abris 211, complexe souterrain de Tulsa, système Fedarix.

- Adjudant ! fit Kelly. Ils arrivent! Ils sont là!

- OK. Je veux connaître leur nombre, leur position et direction.

- On devrait recevoir les données des satellites espion… maintenant.

L’écran de contrôle composant l’un des murs de l’abris s’illumina d’une carte spatiale, et de nombreux triangles rouges apparurent un à un. Au début, ils n’étaient qu’une dizaine, mais les satellites en dénombrait d’autres chaque seconde. Leur nombre ne cessa d’augmenter pendant un long moment, et John espérait à chaque nouveau triangle qu’il soit le dernier. Lorsque cela s’arrêta enfin, Kelly fit un résumé :

- Nous avons quarante-trois vaisseaux ennemis à quatre-mille mètres au-dessus de nous. Il y a parmi eux douze cibles potentielles pour notre mission.

- Pourquoi est-ce qu’ils ne bougent pas ? demanda John.

- Peut-être qu’ils sont en train de scanner la planète, pour vérifier la transmission qu’ils ont interceptée.

- Espérons que nous les avons bien bernés.

Les minutes qui suivirent furent parmi les plus angoissantes des spartans. Les covenants pouvaient très bien se contenter de vitrifier la planète sans perdre de temps. Mais leur immobilité traduisait leur curiosité, et ils finirent par se diriger à vitesse réduite vers la surface. Les satellites espions calculèrent leur trajectoire en une fraction de secondes, et une carte globale de la surface de Tulsa remplaça la carte spatiale. Des croix rouges étaient visibles à une quarantaine d’endroits, dont une douzaine clignotaient d’une lumière intense.

- OK, fit John. Nous avons deux cibles potentielles à notre portée. L’une se dirige vers la ville de Permia, située à cent-trente-trois kilomètres au Nord-Est d’ici. Et l’autre…

John vérifia les données de la cartes, croyant qu’il se trompait. Mais ce n’était pas le cas. Il avait bien vu : le deuxième vaisseau allait vers un canyon désert situé au beau milieu d’un cercle de montagnes, à cent lieux de toute installation humaine.

- Qu’est-ce qu’ils vont foutre là-bas ? se demanda l’adjudant, ahuri.

- C’est vrai que c’est bizarre, l’appuya Kelly. En plus, ils ont également déployé quatre frégates à cet endroit.

- Cette cible est trop dangereuse à atteindre avec ces autres vaisseaux. L’autre croiseur n’a pas d’escorte, et la ville nous offrira un bon couvert d’où frapper. On y va !
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Le capitaine Haric était anxieux. Les covenants étaient finalement arrivés, mais la flotte ne pouvait pas encore attaquer, pas avant que les spartans n’aient investi leur cible. D’après les relevés des satellites espion, il y avait plus de quarante vaisseaux ennemis qui fonçaient vers la surface de Tulsa. Leur disposition n’était pas la même que lorsqu’ils avaient vitrifié Chi Ceti 4, cette action nécessitant une répartition parfaitement homogène de leurs croiseurs de combats.

Les covenants étaient donc tombés dans le piège, et la mission avait une chance de réussir. Dans une vingtaine de minutes, les vaisseaux ennemis seront à la surface. Et là, Dieu seul sait ce qu’auront à affronter les troupes terrestres de contre-offensive.

Yan Haric, en tant qu’agent du SRN, avait eut accès aux documents vidéos enregistrés par les spartans lors de leur excursion à bord du vaisseau ennemi qu’ils avaient détruit. Les créatures qu’ils avaient affrontées n’avaient pourtant pas réconforté les spécialistes, qui affirmaient qu’elles ne pouvaient pas être les constructeurs de tant de technologie. De plus, leur langage étrange à base de piaillements d’oiseaux que les linguistes tentaient d’analyser n’était pas très évolué. Le fait que ces espèces de vautour qu’un humain normal dépassait de deux têtes soient ceux qui les avaient maintenus en échec si longtemps était impensable. Les huiles du SRN avaient donc conclu qu’il existait peut-être des variantes de cette race, avec des castes combattantes et d’autres scientifiques. En tout cas, après cette journée, le CSNU allait enfin être fixé sur la nature véritable de leurs ennemis… s’ils s’en sortaient vivants.

- Capitaine, fit le lieutenant Jerif depuis le poste des communications. Je reçois un message de FLEETCOM adressé à l’ensemble de la flotte. Ils veulent que nous commencions à nous mettre en route vers Tulsa à vitesse réduite.

- Une décision que j’attendais, lieutenant. Au moins, je constate que les amiraux ont bon sens. Lieutenant Hancred ! Poussez les moteurs à vingt-cinq pour cent de leur puissance. Prenez une trajectoire à Huit-Zéro-Cinq.

- A vos ordres ! répliqua le responsable de la navigation.

- Alors ça y est. On y va…
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Le train souterrain traversait les tunnels à tombeau ouvert, fonçant vers la ville de Permia, avec à son bord les trente spartans, accompagnés d’une compagnie de marines, ainsi qu’une vingtaine de TCAO. A l’intérieur, les hommes effectuaient les dernières vérifications de leur équipement, tandis que certains attendaient patiemment le moment de l’action. John remarqua Fred assis sur un siège qui avait peine à supporter les cinq cent kilos de son armure, en train de faire tourner son couteau entre les doigts. Fred avait toujours adoré le combat rapproché, là où il sentait réellement ses capacités physiques et celles de ses adversaires, et son couteau de combat était devenu son équipement favori, dont il ne se séparait jamais. Il le fit tourner en équilibre sur l’un de ses doigts avant de le projeter dans les airs avec un mouvement en spirale, pour finalement le rattraper au niveau de la garde et de le ranger dans son fourreau qu’il portait à la poitrine. Pendant toute l’action, son regard était resté imperturbable, mais lorsqu’il aperçut l’adjudant qui l’observait, il laissa s’échapper un peu de surprise de ses yeux.

- Alors, fit John. T’as l’intention de trancher autre chose que de l’humain ?

- Plus que jamais, John. Je me demande bien de quelle couleur est le sang de ces salopards.

- Je pense que tu auras suffisamment d’occasions pour satisfaire ta curiosité.

- Arrivée dans trois minutes ! annonça la voix prés-enregistrée dans l’ordinateur qui conduisait le train.

- Kelly ! fit l’adjudant. Où en est notre cible?

- Atterrissage dans six minutes !

- Tout le monde en état d’alerte

Immédiatement, les spartans abandonnèrent leurs contrôles d’équipement, et se placèrent accroupi sous les fenêtres de la rame, tenant fermement leurs armes. John voyait qu’ils étaient prêts à en découdre. Tous voulaient leur vengeance, leur heure de victoire. Leur conviction était aussi solide que leurs armures, et leur haine aussi mortelle que leurs lames. Ils iraient jusqu’en enfer pour vaincre, tout comme John, et c’était certainement vers l’enfer qu’ils se dirigeaient.

CHAPITRE CINQ


1202 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Station 648, complexe souterrain de Tulsa, système Fedarix.

- Go go go ! Déployez-vous!

Les Spartans sortirent du train avec la rapidité de félins, certains passant par les fenêtres qui se brisèrent instantanément sous le poids de leurs armures. De leur côté, les marines et TCAO évacuaient leurs propres rames, se déversant comme une marée dans la station souterraine. Le réseau creusé spécialement pour l’opération communiquait avec de grands bâtiments, pour la plupart des chaînes de construction et d’assemblage, permettant de faire sortir à la surface un grand nombre de combattant en un temps record.

Seulement, les spartans privilégiaient la discrétion à la manière forte, contrairement aux troupes de choc orbitales aéroportées. Ils passèrent donc devant pour vérifier le terrain : même si le croiseur ennemi n’arrivait que dans trois minutes, il pouvait très bien avoir déverser des navette de largage bien plus rapides pour faire un débarquement préventif. Tout devait être anticipé, sans quoi ils allaient droit au massacre.

Les rues semblaient encore vierges d’occupation extraterrestre, et John ordonna la dispersion de la force d’attaque en plusieurs groupes compacts, remontant chacun une des rues parallèles remontant vers la grande place de la ville, où le croiseur allait certainement atterrir. Au-dessus de leurs têtes, les soldats pouvaient déjà voir la silhouette agressive à l’apparence organique, qui descendait lentement vers eux. Pour éviter d’être aperçus par d’éventuels capteurs, John ordonna d’utiliser au maximum les couverts pour un déplacement discret. Le vaisseau ennemi n’étant pas parfaitement au-dessus d’eux, les hauts bâtiments de la ville pouvaient les cacher aisément tout en leur permettant d’avancer vers leur objectif. Mais au fur et à mesure de leur progression, John remarqua que le croiseur ne se dirigeait pas vers la grande place de la ville, mais plutôt vers le centre avec ses buildings de verres, situés non loin.

- Mais où est-ce qu’il va ? s’écria-t-il.

- On dirait qu’il veut atterrir de force dans la zone des bureaux de l’administration, remarqua Kelly.

Les spartans observèrent alors le croiseur depuis le couvert d’un magasin de vêtement abandonné. Il se trouvait désormais à plusieurs centaines de mètre au-dessus du sol, et se déplaçait avec lenteur à huit cent mètre à peine de la position des spartans. Puis soudain, lorsqu’il se trouva à deux-cent mètres d’altitude, le vaisseau s’immobilisa, et un énorme rayon d’un violet transparent apparu sous son ventre pour aller frapper le sol.

- Ils vitrifient la planète ? s’inquiéta Fred en réussissant à cacher sa frayeur.

- Non, le rassura John. Il n’y a pas eut d’explosion. Je ne sais pas ce que c’est, mais on ferait mieux de l’apprendre rapidement. On continue !

Le groupe se remit en route, les marines et troupes de choc restant en arrière dans les rues parallèles, le tout formant un triangle offensif se dirigeant vers le croiseur ennemi. Toujours aucune navette non identifiée dans les airs, et la cible ne bougeait plus, avec toujours ce rayon étrange activé. Cela avait pour effet de rendre anxieux les marines, d’énerver les troupes de choc, et de faire douter les spartans.

Soudain, au détour d’une rue, les choses s’accélérèrent. Tan, le meilleur éclaireur de l’équipe, avait été envoyé reconnaître le terrain. Il jeta un coup d’œil au coin de la rue, et leva immédiatement une main fermée pour faire signe d’arrêter la progression.

- Contacts ennemis ! annonça-t-il dans la liaison com.

Tout le monde s’accroupi contre le mur, attendant la suite des informations. John se demanda un instant combien de ces êtres à tête de vautour pouvait contenir ce genre de vaisseau pour effectuer un débarquement… et il se demanda aussi comment ils étaient arrivés au sol avec le croiseur en altitude et aucune navette déployée.

- J’ai de nombreux ennemis en visuel, continua Tan. Mais ils ne sont pas pareils. Ils sont plus petits, avec des masques respiratoires et des réservoirs bizarres dans le dos. Je vous envoie une photo.

L’ordinateur intégré de l’armure de John réceptionna l’image qu’envoya Tan via sa caméra. La rue qu’il observait était couverte de petits être étranges en armure de combats de diverses couleurs allant du jaune très répandu (probablement les soldats de base) au noir complet, en passant par du rouge pourpre. Ils avaient des allures de gros chiens bipèdes, à la peau écailleuse au reflet bleu. Leurs yeux étaient petits et noirs, et leurs mains légèrement disproportionnées par rapport au reste du corps, tenant des pistolets à plasma identiques à ceux que John avait arrachés aux extraterrestres du vaisseau covenant.

- Qu’est-ce qu’on fait, adjudant ? fit le lieutenant Hardvert qui commandait les marines et avait entendu la communication.

- On doit les contourner, répondit-il calmement, et découvrir comment ils ont atteint la surface.

- Je crois que j’ai la réponse à cette question, lança Tan. Regarde ça !

L’adjudant reçu une nouvelle capture d’image de la part de Tan. Elle montrait le rayon violet émit par le croiseur, avec au beau milieu, un flot continu de créatures semblables à celles qui inondaient la rue adjacente, flottant dans les airs entre le croiseur et la surface.

- Un ascenseur gravitationnel ? supposa Kelly.

- On dirait bien.

John reconsidéra la situation rapidement. Il leur restait moins de trois heures avant que le croiseur quitte la surface, dont trente minutes qu’ils devaient user à l’intérieur pendant que la flotte serait en route. Vu la distance leur restant à parcourir, la discrétion était encore possible, et John n’avait pas particulièrement envie d’affronter l’énorme masse extraterrestre juste à côté. Mais les rues n’étaient plus sûres, désormais, et la concentration ennemie augmenterait nettement en s’approchant du rayon. Il fallait donc choisir une autre voix.

- On va passer par les égouts, annonça John. Tout le monde dans les égouts !

L’ensemble des troupes d’abordage se mis alors à la recherche de bouches d’accès, et commencèrent à s’engouffrer dans les sombres tunnels de la ville. Le système de traitement des eaux usées était assez efficace, et les souterrains n’avaient pas l’état déplorable habituel de ce genre de lieux. Ils étaient suffisamment larges pour que trois hommes puissent marcher de front, ce qui ne ralentit pas beaucoup la progression globale.

Alors qu’ils progressaient dans la pénombre, aidés de leurs visions nocturnes, les spartans ressentirent une faible secousse. Puis une autre, et enfin une troisième.

- Des charges de démolition, expliqua Tan. On dirait qu’ils essayent d’entrer dans les bureaux de la manière forte.

- Mieux vaut qu’ils dispersent leurs forces dans la ville, lâcha John. Ca nous fera du boulot en moins pour plus tard. A quelle distance sommes-nous de notre cible ?

- Trois cent mètres. T’as une idée sur notre point de sortie ?

- On va d’abord aller au plus près de leur ascenseur gravitationnel. Ne serait-ce que pour collecter des renseignements. Ensuite, on sortira dans le parking souterrain de l’hôpital, juste à côté de notre cible. Je doute que les covenants s’intéressent aux sous-sols, et on pourra s’y déployer rapidement.

- Bien reçut.

Le groupe continua d’avancer en direction de l’ascenseur gravitationnel. Pendant ce temps, les marines et troupes de choc se dirigeaient déjà vers les sous-sols de l’hôpital en empruntant des tunnels annexes. De nombreuses autres explosions retentirent le long du chemin, ce qui signifiait que les covenants étaient en train de se mettre véritablement au travail. John consulta sa montre, et vit qu’il leur restait encore deux heures avant le départ du croiseur. Il espéra que les troupes terrestres de contre-attaque étaient bien protégées des investigations ennemies, et prêtes à les faire souffrir.

Lorsqu’ils arrivèrent au plus près de leur cible, John ordonna à tous de couper leurs liaisons com. Il n’était pas impossible que le vaisseau puisse capter leurs transmissions, même sur un canal sécurisé. Tan monta à l’échelle vers la sortie, et souleva la plaque d’égout juste assez pour faire passer sa sonde en fibres optique. La rue où se trouvait l’ascenseur gravitationnel était plutôt un boulevard, comprenant deux voies de circulations de chaque côté de la route. Il y avait une foule de ces petites créatures étranges, et quelques-unes de l’espèce qu’avaient rencontré John et Kelly dans le vaisseau ennemi. Celles-ci semblaient diriger les autres, et les surveiller, ce qui démontrait une sorte de hiérarchie covenant. Autour de l’ascenseur, l’ennemi avait déployé ce qui semblait être des tourelles : quatre énormes canons finissant en trois tubes parallèles étaient montés sur des trépieds intégrés, le tout faisant deux mètres cinquante de haut. Ces tourelles étaient chacune maniée par une créature semblable à l’infanterie massive qui se déployait dans toute la ville, se distinguant de leurs semblables par leur armure verte. Il n’y avait aucun véhicule ennemi en visuel, ce qui était plutôt une bonne chose, mais l’assaut direct semblait bien inévitable.

- Alors ? Fit John à Tan en relevant sa visière pour parler.

- On a une centaine d’ennemis autour de l’ascenseur, avec quatre tourelles de type inconnu. J’ai aussi repéré quelques bestioles avec des boucliers.

- Y a-t-il des structures de communication ?

- Aucune. Pas de relais d’antenne dans les parages.

- Alors soit ils ont des systèmes de communication réduits, soit ils n’en ont pas du tout. On ne va pas prendre de risque.

L’adjudant ordonna alors silencieusement à James d’activer le brouilleur qu’il portait. Cela leur permettrait de détruire la force de défense de l’ascenseur sans que le vaisseau en sache quelque chose. Ensuite, tout dépendrait du comité de réception en haut de l’ascenseur.

Les spartans firent mouvement vers les sous-sols de l’hôpital, et y rejoignirent rapidement les marines qui les attendaient. Le lieutenant Hardvert était perplexe. Ne sachant rien de ces ennemis, il fallait rester prudent. Même si l’assaut direct représentait leur seul chance d’atteindre le croiseur, cela restait une action risquée.

- Vous avez un plan pour passer ça, chef ? dit-il.

- Oh oui, j’en ai un. Et ces enfoirés vont le sentir passer.

CHAPITRE SIX

1223 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Hôpital St Constantin, ville de Permia, planète Tulsa, système Fedarix.

- Feu à volonté !

L’ordre de l’adjudant arriva jusqu’aux tireurs d’élites placés sur le toit de l’hôpital, qui lâchèrent une salve mortelle de balle de 15,5 mm sur les rapaces à bouclier, qui furent tous descendus. Dans le même temps, quatre marines équipés de lance-roquettes JackHammer postés au troisième étage propulsèrent leur première vague d’explosifs sur les tourelles ennemies, qui explosèrent en une gerbe de plasma bleutée, emportant avec elle quatre ou cinq ennemis chacune. La deuxième vague de roquette alla se perdre dans la foule des créatures extraterrestre, faisant des dizaines de victimes. Après cette entrée fracassante, cinquante marines apparurent aux fenêtres du bâtiment et délivrèrent un déluge de balle sur l’ennemi, pendant que les spartans et l’ensemble des troupes de choc sortirent par la grande porte pour foncer droit vers l’ascenseur. Des dizaines de grenades volèrent à la rencontre des petites créatures qui, privées de leurs supérieurs et attaquées de tous les côtés, étaient en proie à la panique la plus complète. En à peine quelques secondes, la centaine d’ennemis qui entourait l’ascenseur gravitationnel fut éliminée, inondant le boulevard d’un sang bleu-ciel gélatineux et brillant. Aucune perte alliée n’était signalée, ce qui renforça nettement le moral des hommes.

Les spartans et les troupes de choc entourèrent l’ascenseur, afin de réceptionner d’éventuels renforts ennemis le temps que les marines sortent à leur tour de l’hôpital. Fred profita qu’il était proche de l’adjudant pour lui avouer :

- Je m’attendais à plus difficile, finalement.

- Moi aussi, lui confia John. Mais je pense que le résultat n’aurait pas été le même avec une attaque plus longue.

C’est vrai : ils avaient eut la chance de bénéficier de l’effet de surprise et d’une forte puissance de feu. Sans cela, ils auraient reçut de plein front la réplique adverse. Et aux vues de ce que John avait put apercevoir de leur arsenal dans le vaisseau qu’il avait abordé auparavant, il préférait ne pas avoir à subir d’autres échanges de tirs ennemis.

- Grace ! fit John. Désigne notre cible à la flotte!

Aussitôt, la spartan Grace-093 épaula son désignateur, et marqua le croiseur au laser. A partir de là, ils avaient trente minutes avant l’arrivée de la flotte. Les covenants détecteraient les vaisseaux du CSNU bien assez vite, ce qui n’obligerait donc plus la discrétion. Lorsque tous les marines furent sortis, les spartans et quelques TCAO se placèrent dans le cercle lumineux du rayon gravitationnel.

- J’espère qu’il ne faut pas être à l’intérieur pour activer la montée… murmura John en serrant les dents.

Mais la chance était avec eux, et quelques secondes plus tard, les troupes humaines furent soulevées par une force inconnue, et entraînées vers le croiseur. Derrière eux, les marines se préparaient déjà à monter en vagues successives. La vision de cet énorme vaisseau vers lequel ils se dirigeaient avait quelque chose d’impressionnant. Sa coque, illuminée par le faible soleil du système Fedarix, semblait presque vivant, prêt à les avaler pour que ses organismes de défense puissent les massacrer. Mais John et ses spartans étaient loin d’être facilement impressionnables. Leurs esprits étaient préparés, depuis si longtemps qu’ils ne s’en souvenaient pas, pour cette mission.

Lorsqu’ils arrivèrent à cent mètres de l’intérieur du vaisseau, John activa une grenade étourdissante et la lança le plus fort qu’il le put. Elle fonça vers le ventre du croiseur, afin de neutraliser temporairement tout comité d’accueil éventuel. Les humains atterrirent à l’intérieur d’une grande pièce, à moitié remplie par d’énormes caisses métalliques à la couleur mauve. Entre ces caisses se trouvaient quelque uns des extraterrestres grognards, qui se frottaient les yeux énergiquement, car éblouis par l’explosion de la grenade étourdissante. Ils furent promptement exécutés sans sommation.

Le reste des troupes d’abordage arriva sans peine, se déployant dans l’énorme pièce au plafond voûtée, éclairée uniquement par quelques lampes discrètes dont la lumière se répercutait dans toutes les directions, donnant un éclairage uniforme. Les marines essayèrent d’ouvrir plusieurs caisse covenants, mais elles semblaient fermée par un mécanisme électromagnétique.

- Laissez faire, messieurs, fit Fred en s’approchant muni de son zappeur.

D’une décharge électrique, le spartan fit griller le verrou, et ouvrit l’énorme caisse métallique. A l’intérieur se trouvait ce qui ressemblait à des armes. Assez petites pour se porter d’une seule main, elles étaient chacune formée d’une demi-sphère trouée par de nombreux cristaux violets. Fred en prit une, et la pesa : elle était d’une légèreté déroutante. Il la pointa vers un coin vide de la pièce et tira. Les dizaines de cristaux plantés dans l’arme furent soudainement projetés un à un vers le mur, et s’y plantèrent avant d’exploser quelques secondes plus tard. Il ne put s’empêcher de donner son avis à voix haute :

- Intéressant.

- Spartans ! ordonna John. Déverrouillez autant de caisses que possible, et que tout le monde s’équipe. Je veux trois groupes de reconnaissance sur les trois sorties de cette salle !

Immédiatement, trois détachements de quatre spartans se dirigèrent chacun vers l’un des trois accès de la salle de l’ascenseur. Les portes étaient grandes, au moins deux mètres cinquante, aux formes arrondies, composées de deux moitiés verticales qui s’écartaient au moindre mouvement à proximité, dans un mouvement circulaire. Il n’y avait apparemment personne dans les couloirs communicants, ce qui augmentait l’angoisse générale. Les covenants auraient-ils déployé toutes leurs forces au sol ? Combien de soldats pouvait contenir un croiseur de ce type ? John savait qu’ils n’allaient pas tarder à le savoir.

CHAPITRE SEPT

1251 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat Teflor, système Fedarix.

Le croiseur Teflor, de par sa grande vitesse, se trouvait en première ligne de la force de contre-attaque spatiale, et le capitaine Haric en était fier. Ils étaient déjà à trois unités astronomiques de Tulsa, et les vaisseaux ennemis n’avaient pas encore bougé. La contre-attaque au sol n’avait pas encore été déclenchée, et débuterait dès que les covenants aurait détecté la flotte du CSNU qui fonçait droit sur eux.

Mais Haric savait que leurs chances de succès étaient faibles. Une centaine de bâtiments contre une quarantaine ennemis. Ce n’était pas vraiment ce qu’ils avaient prévu. D’habitude, les attaques covenants réunissaient rarement plus d’une douzaine de vaisseaux, même sur des planètes-forteresses comme Gainus prime, qui avait été vitrifiée sans sommation, et sans que les nombreuses divisions d’infanteries et de blindés qui se trouvaient au sol puissent avoir fait quoi que ce soit.

Cette opération tiendra certainement plus de l’attaque éclaire que de la répression massive. Et de toute façon, les covenants auront largement le temps de se mettre en position pour réceptionner la flotte du CSNU.

- Capitaine ! fit le lieutenant Hancred, l’officier de navigation. Les vaisseaux ennemis font mouvement !

- Et la cible ?

- Nous avons confirmation que les spartans ont investi un croiseur, qui rejoint le reste de la flotte covenant en orbite mais… j’ai confirmation par les satellites de surveillance de Tulsa qu’un groupe de vaisseaux ennemis est resté en surface… et sur une position à l’importance stratégique nulle.

Yan Haric fut évidemment surpris d’une telle nouvelle. Les covenants étaient certes largement suffisants en nombre pour repousser l’attaque humaine, mais pourquoi leur seul groupe resté en arrière s’attarderait sur un tel objectif ? Mais ce n’était pas cela qui était important pour l’instant. L’important était de survivre à la bataille.

- Combien de bâtiments ennemis rejoignent l’orbite ?

- Trente-cinq, capitaine. Onze croiseurs et vingt-quatre frégates. Ils se postent en formation défensive de type Lambda, avec leurs plus gros bâtiments en première ligne.

- Quels sont les ordres de l’amirauté ?

- L’amiral Stanforth demande à ce que tous les CAM soient concentrés sur les croiseurs, et les missiles Archers sur les frégates. Une fois les tirs effectués, nous devrons virer à 90° tribord pour encaisser leurs décharge plasma sur notre flanc.

- D’abord on va essayer de se rapprocher le plus possible, annonça Haric. Prenez une trajectoire Deux-Six-Zéro et donnez-moi une solution de tir correcte des CAM et des missiles.

- A vos ordres ! répliqua le lieutenant Maida du poste des armements. CAM chargé dans cent trente-cinq secondes.

- Poussez les moteurs au maximum et préparez-vous à virer de bord une fois que nous aurons lâché notre première bordée.

Tout le vaisseau était en effervescence. C’était la plus grande bataille spatiale depuis l’insurrection du système Kantrec où les rebelles avaient réussi à rassemblé plus de soixante vaisseaux de combat. Seulement, il s’agissait pour la plupart de vaisseaux civils volés et grossièrement modifiés pour faire office de bâtiment de guerre, et ils n’avaient pas résisté bien longtemps à la formidable puissance des véritables croiseurs de combat du CSNU. Haric avait participé à cette bataille. Il avait éventré plus d’une demi-douzaine de frégates ennemies à lui seul… mais aujourd’hui, il aurait préféré que l’amirauté ait négocié avec les rebelles. Peut-être auraient-ils trouvé un compromis, et alors leurs vaisseaux n’auraient pas eut besoin d’être détruits. Des vaisseaux qui auraient put leur être bien utiles pour cette bataille, ne serait-ce que pour leur servir de bouclier…

Haric avait vu suffisamment de puissants bâtiments de la Navy se faire transpercer de part en part par ce maudit plasma covenant dont on n’arrivait toujours pas a connaître la composition, et encore moins la méthode par laquelle ces bâtards contrôlaient sa trajectoire. Le Teflor avait survécu à de nombreux engagements, mais il n’avait pas encore eut la malchance de se faire toucher par une arme autre qu’humaine. Et cette bataille ne le laisserait certainement pas indemne. Il pourrait même ne pas s’en sortir.

Mais il n’était pas temps de réfléchir à ce qui aurait été possible, et plutôt de concentrer ses facultés mentales sur la situation qui n’allait pas tarder à être pour le moins explosive.

- Capitaine ! Fluctuation énergétique sur les flancs des vaisseaux ennemis ! Ils s’apprêtent à tirer !

- Combien de temps pour le CAM ?

- Charge terminée dans douze secondes !

- Stabilisez la trajectoire, et envoyez tout de suite les missiles Archers !

Une forêt de panaches blancs surgit de la coque du Teflor pour s’envoler avec célérité vers la flotte extraterrestre. Les autres vaisseaux du CSNU firent de même, prolongeant cette forêt sur une énorme distance. Les missiles filèrent vers leurs objectifs et explosèrent en un océan de feu qui ravagea les frégates ennemies. Leurs boucliers s’illuminèrent aux premiers impacts, puis s’affaiblirent, et enfin disparurent, laissant les coques nues face aux derniers explosifs qui virent trouer leur surface argentée. Des dizaines de vaisseaux ennemis s’embrasèrent ou explosèrent littéralement sous cette salve.

- Rapport ! ordonna le capitaine.

- Seize frégates détruites, et cinq autres en mauvais état.

- CAM chargé ! annonça le lieutenant Maida.

- Feu !

Le CAM du Teflor fut le premier à être tiré. Un projectiles en tungstène ferrique superdense à haut degré de perforation transperça l’espace tel un éclair, déchirant le vide qui le séparait de sa cible. Celle-ci le prit de plein front, ne semblant pas y faire attention. Pourtant, son bouclier ne la sauva pas, disparaissant presque immédiatement, comme s’il n’y en avait jamais eut. L’obus traversa le vaisseau en entier dans le sens de la longueur, créant un trou si grand qu’une fissure se dessina sur la coque, avant que le bâtiment ennemi ne se coupe en deux moitiés quasi symétriques dont les parties intérieures visibles étaient nimbées de flammes bleues, issues des fuites de plasma covenants.

- Magnifique tir, lieutenant.

- Capitaine ! Torpilles à plasma tirées ! Impact dans soixante-quatre secondes !

- Virez à tribord sur une trajectoire zéro-six-cinq, et fermez les cloisons étanches. Préparez l’équipage à recevoir leur paquet de merde bleue.

Sans chercher à connaître le résultat du reste des tirs de CAM de la flotte, le Teflor fit une embardée sur la droite, plongeant sous la surface théorique sur laquelle les deux flottes s’étaient positionnées, espérant semer quelques uns des projectiles extraterrestre. Mais plusieurs torpilles à plasma changèrent de trajectoire pour l’intercepter. Même avec la vitesse comme atout majeur, le Teflor ne pouvait pas distancer ces tirs, et Haric le savait très bien :

- Stoppez les moteurs ! Virez sur un vecteur huit zéro quatre pour présenter notre flanc bâbord à ces torpilles. Lancez les contre-mesures et transférez la totalité du carburant dans le réservoir tribord !

- Contre-mesures lancées ! Impact dans vingt-trois secondes !

Le capitaine Haric s’agrippa aux bras de son siège de commandement, priant pour que le vaisseau tienne bon. En quelques secondes, il fit mentalement le tour complet du vaisseau, revoyant chaque coursive, chaque couloir de maintenance, et les hommes qui y étaient postés. Lesquels allaient mourir les premiers ? Y aurait-il seulement des premiers ? Si les torpilles à plasma atteignaient la section des missiles, cela pourrait entraîner une réaction en chaîne sur tous les systèmes d’armement du vaisseau. Il y avait peu de chance pour que les réservoirs tribords soient touchés, mais cela restait également possible.

Yan Haric fit le décompte des vingt-trois dernières secondes avant impact dans sa tête. A zéro, le vaisseau tout entier fut secoué comme un jouet par les explosions qui retentirent le long de sa coque.

CHAPITRE HUIT

1336 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat covenant inconnu, Système Fedarix.

John fit un bond de côté pour éviter la déflagration de la grenade à plasma covenant, lancé par un grognard adroit posté depuis les passerelles supérieures du hangar à navette. Linda profita que le petit extraterrestre s’était exposé pour lui envoyer une balle aussi longue qu’une main humaine. Le mur du hangar se tâcha du sang gélatineux du petit être qui tituba un instant, la tête arrachée par la puissance du tir, avant de tomber depuis la passerelle jusqu’aux pieds des spartans qui finissaient d’investir la zone. Il y avait là deux transporteurs ennemis, des engins en forme de U un peu plus long qu’un Pélican et à la coque sombre, qui flottaient aux-dessus de leurs têtes, et une forêt de containers attendant d’être ouvert. Mais les spartans avaient déjà récupéré suffisamment de matériel pour progresser rapidement dans la structure du croiseur.

Malgré le fait de n’avoir épargné aucune zone importante du croiseur, les forces d’abordage n’avaient pas rencontré d’autres races extraterrestres que les petits grognards et les êtres à tête de rapace. Il y avait juste eut la deuxième section des marines qui devait sécuriser les hangars bâbord, et qui avaient réclamé des renforts immédiats en hurlant dans la liaison COM des affolements mentionnant des ennemis invisibles qui les taillaient en pièce. John n’en était pas sûr, mais il était possible que ces ennemis soient les forces d’élites commandant les autres races et qui auraient préféré fuir le vaisseau. Cela signifiait qu’ils savaient laquelle des forces d’abordages était la plus faible, donc que leur progression était surveillée depuis le début. Et si ces ennemis avaient réussi à fuir le croiseur, ils avaient certainement prévenu le reste de leur flotte que ce bâtiment était passé aux mains des humains. Le temps était donc compté.

Le vaisseau était déjà conquis à 40%, mais avec le flanc bâbord fragilisé par la perte de la deuxième section de marines, cela risquerait de devenir plus lent. Il fallait donc changer leur plan :

- Fred ! appela John. Il faut qu’on s’active ! Si la flotte ennemie apprend que ce croiseur est perdu, ils n’hésiteront pas à le détruire. Que la première section de marines et le groupe Bêta des troupes de choc se mettent en mode défensif afin de conserver les zones pacifiées. Le reste des TCAO ira avec nous pour atteindre le pont de commandement au plus vite et prendre le contrôle du vaisseau.

- Compris ! Je passe le mot.

Quelques instants plus tard, le groupe offensif fut réuni. Les troupes de choc étaient impatientes d’en découdre, mais sur leur visage se lisait tout de même une forte antipathie envers les spartans. Depuis l’aventure de l’adjudant avec quatre d’entre eux dans le gymnase du porte-vaisseaux Atlas, les membres de ces forces spéciales avaient développé une haine discrète envers les super-soldats de la Section Trois. John revoyait les images des corps de ces quatre soldats étendus sur le ring de boxe, ainsi que le sang tachant le sol du gymnase. Il aurait put éviter de les tuer. Il avait eut pour mission de les vaincre, peut importe la méthode, mais c’étaient des camarades militaires. Les mots de l’adjudant-chef Mendez lui revinrent en mémoire :

Toutes les missions n’ont pas des objectifs simples ou ne mènent pas à des conclusions logiques. Vos priorités sont de suivre les ordres des voies hiérarchiques, puis de préserver votre vie et celle de votre équipe.

Sa mission actuelle combinait ces trois objectifs, mais John préférait savoir ce qu’il avait à faire, plutôt que d’endosser la responsabilité des décisions stratégiques. L’adjudant était un homme de combat, un chef d’escouade, mais pas un commandant. Il avait une mission, et il allait l’accomplir, peut importe la méthode ou même le prix.

- Unité ! annonça-t-il. En avant !

- Ola, doucement, fit le sergent Fox qui dirigeait les forces des TCAO. Je ne reçois pas d’ordre des patchworks de la section Trois. Faites ce que vous voulez, les gars, mais on va s’occuper de prendre le pont de commandement. On a pas besoin de vous, alors laissez faire les vrais mecs.

- Vous oubliez que cette mission est classée secrète de la plus haute importance, et que le Haut Commandement a donné pleine autorité aux membres de la Section Trois. Cela signifie que, en tant que plus haut gradé de ma section, j’ai pleine autorité sur mes hommes, sur les hommes du lieutenant Hardvert, et sur vous.

Le regard du sergent s’assombris, son agressivité se diffusant à travers toute la nervosité qui faisait trembler son corps de façon à peine perceptible, même pour les spartans. Il fit une moue de soumission forcée, et souffla fortement en signe d’acquiescement.

- Bien, sergent, continua John. Alors que vos hommes restent en arrière pour pouvoir effectuer des tirs de soutient. Et maintenant, on y va !

_______________________________

Le caporal Allan Ledge de l’escouade Ravage des TCAO vérifia une dernière fois que les charges étaient bien placées et actives. Il ne comprenait pas vraiment pourquoi les huiles du SRN lui avait confié cette mission, mais il avait ses propres raisons de l’accomplir. Les spartans ne s’en sortiront pas, cette fois-ci. Ce qu’il avait espéré depuis ci longtemps allait enfin se réaliser.

Pastror… Cortez…Fitz… les seuls amis qu’il ait réellement eut. Ses camarades de combat avec lesquels il avait tout partagé… morts. Tués par ce monstre qui était si aimé par les généraux, battus à mort rien que pour amuser cette abomination génétique. Allan ressentait encore la douleur de la greffe d’organes que les médecins avaient dû effectuer pour le sauver. Il revoyait ses amis étendus sur ce ring de boxe, leur sang s’infiltrant sur le tapis de combat. Eux n’avaient pas pût être sauvés. Pastror et Fitz étaient déjà morts avant que les médecins n’arrivent, et Cortez a lâché alors qu’ils le transféraient à la clinique d’organes. Allan avait eût la chance de survivre assez longtemps pour que l’opération le sauve. Le spartan lui avait perforé un poumon et écrasé la cage thoracique d’un coup de pied. Heureusement, son hémorragie interne n’était pas trop importante.

Allan régla la minuterie des charges et s’éloigna pour rejoindre le reste du groupe de combat.

- Tu aurais mieux fait de me tuer ce jour-là, enfoiré.

CHAPITRE NEUF

1348 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat Teflor, système Fedarix.

Les ténèbres se dissipèrent lentement de la vision de Yan Haric, et il revit à nouveau le pont de commandement dont le décor avait complètement changé. Des courts-circuits projetaient des gerbes d’étincelles dans toute la salle, alors que plusieurs plafonniers et autres éléments faibles s’étaient décrochés et brisés sur le sol. Le lieutenant se releva du sol métallique du pont de commandement en sentant chacun de ses muscles le faire souffrir, et essuya le sang qui coulait de son front d’un revers de la main avant de s’adresser à ses officiers qui revenaient lentement à eux :

- Situation ?

- Brèche à la section Gamma 9. Isolation automatique effectuée. Coque du flan bâbord à 40%.

- Et la machinerie ?

- Section de contrôle des fluides de refroidissement bâbord endommagés mais toujours opérationnels. Sinon il n’y a pas de dégâts majeurs.

- Quel est l’état de notre armement ?

- Les tubes de lance-missiles D à G sont hors d’usage, ainsi que la tourelle de défense numéro trois.

- Et la bataille ?

- Notre flotte a totalement engagé l’ennemi. Les croiseurs covenants ne font pas attention à nous. Ils semblent nous croire à la dérive et sont trop occupés avec nos autres vaisseaux.

- Alors nous allons attirer leur attention. Dirigez-nous sur une trajectoire deux-six-zéro et préparez les charges. Où en est le CAM ?

- 72% ! Prêt dans quarante-huit secondes.

- Donnez-moi une solution de tir sur le premier croiseur ennemi que vous trouverez, et verrouillez tous nos missiles disponibles sur une même frégate covenant.

Le Teflor reprenait vie. De toute la puissance de ses réacteurs, il fonça vers la gigantesque bataille qui se déroulait en orbite. Le vide de l’espace était rempli d’explosions, de lumière et de débris innombrables, créant un champ d’astéroïdes artificiel dans lequel la navigation était des plus difficiles. Le Teflor était encore loin de ce chaos, et cela lui donnait un avantage. Ses tubes lance-missiles encore opérationnels délivrèrent une volée de fusées dont le panache donna au croiseur un air de fontaine de fumée, dont les projections allèrent s’écraser contre le bouclier de la frégate ennemie la plus proche. Ses boucliers encaissèrent la plus grande partie des explosions, mais une demi-douzaine de missiles percèrent la protection affaiblie pour creuser d’énormes trous dans la coque argentée du vaisseau extraterrestre. Celui-ci se mit alors à gîté par tribord, n’ayant apparemment plus aucun contrôle sur sa propulsion. Il alla s’écraser contre l’énorme carcasse du destroyer Vengeance du CSNU, dont les restes encore fumants et rongés par le plasma covenant furent broyés par le choc, qui n’épargna aucun des deux vaisseaux.

- Très jolie volée, lieutenant Maida.

- Capitaine ! intervint le lieutenant Hancred. Nous avons un visuel de l’objectif alpha.

Les écrans principaux du pont transmirent aussitôt la vision des caméras frontales et effectuèrent un zoom sur un croiseur covenant naviguant au milieu des débris et de la destruction. Il ressemblait à n’importe quel autre croiseur covenant, mais les capteurs thermiques identifiaient clairement l’empreinte laser qu’avaient marqué les spartans lorsqu’il était à la surface de Tulsa.

- Parfait ! Connaît-on la situation à l’intérieur ?

- Négatif, mon capitaine. Les spartans n’ont pas encore donné le signal de capture.

- Alors restez à distance sans le perdre. Nous allons le surveiller, puis nous l’escorterons au point de sortie lorsqu’ils l’auront pacifié.

- Capitaine ! Nous détectons plusieurs vaisseaux mineurs qui émergent de l’objectif.

- Probablement ses occupants qui préfèrent se sauver qu’affronter les spartans. Abattez-les !

Une nouvelle fontaine de missile surgit alors des tubes lanceurs, et se lança à la poursuite des vaisseaux ennemis. Quelques secondes plus tard, une série d’explosion illumina la noirceur de l’espace.

- 75 % des cibles ont été détruites, monsieur, rapporta Maida. Les autres ont réussi à semer nos missiles dans les débris.

- C’est toujours autant de covenants morts, la félicita-t-il. Le CAM est-il chargé ?

- Affirmatif !

- Gardez-le en réserve pour l’instant. Lieutenant Hancred ! Placez-nous à trente kilomètres de l’objectif et alignez-vous sur son allure.

- Capitaine ! Un croiseur ennemi vient de lâcher une volée de torpilles à plasma !

- Essayez de trouver un débris suffisamment gros pour pouvoir nous servir de bouclier et placez-vous derrière.

- Capitaine, ce n’est pas sur nous qu’ils ont tiré.

- Alors qui visent-ils, bon sang ?

- L’objectif alpha.

CHAPITRE DIX

1352 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat Teflor, système Fedarix.

- Vous pouvez répéter ? s’exclama Yan.

- Ils tirent sur leur croiseur abordé.

Le capitaine Haric accepta la situation car le CSNU c’était attendu à une telle réaction de la part des covenants, mais pas aussi tôt. L’amirauté espérait que leur orgueil les aurait obligé à considérer le vaisseau comme perdu uniquement lorsque les spartans en aurait pris le contrôle total. Or, d’après sa trajectoire actuelle, et les divers tirs de plasma qu’il délivrait par salve régulière sur les vaisseaux humains à sa portée, il n’était pas encore complètement conquis. Mais vu qu’apparemment une grande quantité de l’équipage avait tenté de fuir, et qu’une partie avait réussi, la situation du croiseur covenant semblait sur le point de basculer en faveur des spartans. Les extraterrestres devaient avoir laissé juste assez de navigateurs pour manœuvrer le vaisseau, et le reste était parti prévenir le reste de leur flotte de la tragédie. Et maintenant, ils préféraient détruire l’un de leurs bâtiments de guerre plutôt que de le laisser entre les mains des humains. Et cela, Haric ne le permettrait pas :

- Calculer une trajectoire d’interception des torpilles.

- Quoi ? lui renvoya le lieutenant Hancred, les yeux écarquillés.

- Nous allons nous interposer, et encaisser les tirs à la place de l’objectif. Combien de temps avant l’impacte ?

- Cinquante-huit secondes, monsieur.

- Poussez les moteurs au maximum de leur puissance, et tentez de tirer le CAM sur ces salauds le plus vite possible. Sinon notre sacrifice ne servira à rien, et ils détruiront l’objectif à leur prochaine salve.

- Fenêtre de tir dans quatorze secondes ! Solution de tir calculée !

- Refaites le calcule de la solution de tir avec une réduction de vitesse de 40%. Il ne faut pas qu’on loupe notre coup.

- Solution de tir corrigée ! Fenêtre de tir dans dix-neuf secondes !

Le Teflor tourna pour faire face à l’agresseur. Yan savait que la moindre erreur, le moindre écart dans la trajectoire du CAM pouvait tout faire rater. Contrairement aux missiles balistiques et tactiques, les charges de CAM n’étaient pas capables de corriger leur trajectoire en plein vol, et traçaient toujours un chemin parfaitement rectiligne. Heureusement, la cible à abattre n’était qu’à soixante trente kilomètres du Téflor, mais un échec était autant possible qu’interdit à l’équipage. Il fallait que la dernière action de ce vaisseau soit parfaite, afin que sa perte ne soit pas inutile.

L’immense obus de tungstène fut projeté avec une force colossale en direction du croiseur covenant qui ne bougea pas. La trajectoire était parfaite, et le projectile transperça sa cible de front, traversant l’intégralité de sa structure pour aller faire exploser les réserves de plasma des machineries. L’explosion se teinta subitement de bleu et prit une ampleur énorme, à peine contenue par le bouclier énergétique qui fini par disparaître. Bien vite, il ne resta plus du grand vaisseau extraterrestre qu’une constellation de débris argentés.

- Excellent, lieutenant ! Poursuivez la trajectoire d’interception et présentez aux torpilles notre flanc tribord

- Impacte dans trente-trois secondes.

- Envoyez le reste de nos missiles Archer en direction des torpilles ennemies, et faites-les exploser lorsqu’ils seront au plus près d’elles.

- A vos ordres !

Les derniers missiles du Téflor s’envolèrent à la rencontre de leurs homologues covenants. Du fait de la destruction du croiseur, les torpilles n’étaient plus guidées, mais apparemment, l’équipage du croiseur abordé savait qu’ils devaient se sacrifier pour éviter que leur vaisseau soit capturé, et ils l’avaient immobilisé. Les torpilles à plasma fonçaient donc en ligne droite vers une cible statique, avec pour dernière défense le Téflor.

La simple proximité du plasma des projectiles extraterrestres suffit à faire exploser plusieurs missiles Archer. Les autres furent activés à distance par l’équipage du Téflor, créant un mur d’explosion qui retint un certain nombre de torpilles covenants. Le lieutenant Maida releva les résultats de l’interception :

- Trois torpilles sur huit ont été détruites, monsieur.

- Impacte dans dix secondes ! annonça le lieutenant Hancred.

Le capitaine Haric regarda les visages des hommes et des femmes présents sur le pont. C’était de bons éléments du CSNU, la crème des écoles navales. Il n’avait aucune envie de les sacrifier, mais il savait que cela devait être fait. C’était comme une évidence, un destin. Il repensa à ce spartan qui avait trouvé la mort dans l’explosion de cette frégate covenant. Ce soldat devait avoir ressenti la même chose : devoir se sacrifier par nécessité. Cette impression était comme un trou noir absorbant toutes vos pensées pour ne laisser que la courte satisfaction d’avoir accomplit quelque chose d’utile.

Ces pensées furent les dernières du capitaine Yan Harric.

CHAPITRE ONZE

1423 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat covenant inconnu, Système Fedarix.

John ne remarqua pas tout de suite les lumières rouges clignotantes qui apparurent le long des couloirs et aux plafonds des salles. Le vaisseau était en état d’alerte. A quel niveau est pour quelle raison, il l’ignorait, mais ce n’était certainement pas étranger à leur abordage. Les troupes d’assaut humaines avaient conquis presque la moitié du vaisseau. Mais depuis quelques minutes, ils n’avaient plus rencontré aucune résistance. Les derniers membres d’équipage devaient s’être regroupés autour des points cruciaux du bâtiment pour organiser leurs derniers carrés défensifs.

Le plan de l’Adjudant était de franchir le plus rapidement possible le croiseur jusqu’au pont de commandement afin d’en prendre le contrôle avant que la bataille spatiale soit terminée et les forces du CSNU complètement anéanties. Les TCAO se chargeraient de couvrir leurs arrières pendant que les marines défendaient les secteurs sensibles du vaisseau qu’ils avaient déjà sécurisé. Mais l’absence d’ennemis dans les couloirs commençait à rendre tout le monde un peu nerveux. John ne s’était pas attendu à rencontrer autant de troupes de combat ennemies à bord, ni à ce qu’elles opposent une telle résistance. Les simulations avaient estimé que le croiseur serait conquis en une heure trente maximum, et cela faisait plus de deux heures que les troupes humaines combattaient dans les coursives et les salles pressurisées.

John sentait la pression monter parmi son équipe, et cela le fit accélérer. Mais lorsqu’il approcha de la porte devant lui, il entendit un bourdonnement. C’était le même bourdonnement que celui qu’émettait l’arme des rapaces. Cela le mit en alerte et il fit signe à tout le monde de se mettre à couvert. Les spartans disparurent alors dans les renfoncements du couloir. D’une suite de mouvements de la main, l’adjudant ordonna à Tan, James et Fred de se mettre en position d’assaut devant la porte. Une fois prêts, Tan et Fred ouvrirent s’approchèrent juste assez pour enclencher son ouverture, et délivrèrent un tir de suppression sur les covenants visibles pendant que James lançait une paire de grenades fumigènes. Tan et Fred laissèrent la porte se refermer, et tout le monde attendit les sept secondes nécessaires à la diffusion de la fumée.

- Interdiction d’utiliser les munitions explosives, ordonna John. Si les covenants se sont retranché ici, cela veut dire que cette pièce est importante. Equipement de proximité !

Les fusils à pompes, les pistolets M6D et les couteaux de combat furent sortis de leurs étuis. Les spartans activèrent leur vision thermique avant d’effectuer une charge massive dans la salle. La fumée avait rempli la totalité de l’espace, et la visibilité était quasi nulle. Les grognards rapaces covenants étaient désemparés, courrant dans tous les sens en hurlant et piaillant. Ils furent massacrés sans pitié par les soldats en armure, qui n’eurent même pas besoin de tirer. John s’amusa a regarder Linda faire ce dont elle n’avait pas l’habitude : du combat rapproché. Elle se contentait de délivrer des séries de coups de poing et de pieds, qui grâce à l’augmentation de son armure étaient aussi meurtriers que ses balles de sniper sur les petits êtres frêles. Lorsque la fumée se dissipa, les spartans purent voir qu’ils étaient dans une grande salle haut de plafond avec une vaste passerelle surélevée accessible par un unique escalier et couverte d’écrans digitaux. Des sortes de tranchées entouraient la passerelle, et une porte se trouvait à chacun des quatre murs de la pièce.

- On dirait un pont de commandement, remarqua Tan.

- Mais normalement, répliqua Fred, les salles de contrôles se trouvent à l’avant des vaisseaux.

- Dans la logique humaine, oui, répondit John, mais c’est un croiseur covenant, donc toute logique humaine doit être mise de côté. Essayez de trouver les commandes de la propulsion.

Une demi-douzaine de spartan se dirigea vers les panneaux de contrôle lumineux et transparents pendant que les autres se dispersaient pour former un périmètre de défense. Mais les symboles incompréhensibles de la langue covenant les obligeait à essayer tous les boutons. Soudain, après plusieurs secondes angoissantes de tests, les spartans ressentirent une légère secousse, et comprirent que le vaisseau avançait. Rapidement, les commandes de direction furent trouvées et leur fonctionnement assimilé. John se décida alors à contacter FLEETCOM, et ordonna à James de désactiver son brouilleur.

- FLEETCOM, ici groupe d’abordage. Objectif primaire accomplit, je répète, objectif primaire accomplit. Demandons assistance et protection.

- Bien compris, adjudant. On vous envoie tout ce qu’on a à porté de main. Dirigez-vous vers le satellite principal de Tulsa pour accomplir votre saut vers le système Gemonius.

- Reçu cinq sur cinq. On a quelques problèmes pour assimiler les commandes covenantes, donc il peut y avoir des imprévus. On va essayer de faire vite. Terminé!

John n’avait pas encore coupé la liaison COM qu’il entendit une explosion et le vaisseau tout entier se mit à trembler énergiquement.

CHAPITRE DOUZE


1428 heures, 15 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur de combat covenant inconnu, Système Fedarix.

- Accrochez-vous ! hurla John.

Les spartans s’agrippèrent à tout ce qu’ils trouvèrent pour éviter de tomber à la renverse alors que le vaisseau tout entier vibrait comme sous l’effet d’un tremblement de terre.

- On nous a tiré dessus ? demanda l’adjudant aux spartans postés devant les commandes du croiseur.

- Négatif, chef. Le bouclier n’a pas été touché. L’explosion semble être partie de la section des machineries.

- Un sabotage ?

- Peut-être un système de sécurité covenant, ou un système d’autodestruction partiel que l’équipage aurait activé.

- Quels sont les dommages ?

Cette question était plus une formalité qu’une véritable demande, car il était facile de voir que la situation du croiseur était critique : tous les écrans de contrôles avait abandonné leur tente violette pour un rouge vif et les symboles covenants clignotaient énergiquement pendant qu’un signal d’alarme sonore couvrait le bruit du tremblement qui faiblissait peu à peu.

- Il semble que toute la section motrice du croiseur est gravement endommagée. Nous n’avons plus aucune propulsion.

L’adjudant avait du mal à admettre de telles nouvelles. Les spartans n’avaient encore jamais échoué à une mission, et pourtant ils n’avaient désormais aucun moyen de mener celle-ci à bien. Sans aucune propulsion, ils ne pouvaient plus faire évacuer le vaisseau, et un bâtiment de cette taille ne pouvait pas être remorqué, sauf par une station de réparation spatiale, mais l’amirauté n’avait pas jugé nécessaire d’en faire acheminer une dans le système. Et tenter de réparer les dommages n’était même pas envisageable, vu la complexité de la technologie covenant qui était d’ailleurs la raison de cette mission. John eut le plus grand mal du monde à donner ses ordres :

- On évacue le vaisseau. Que tout le monde rejoigne les docks.

Puis il activa sa liaison COM et se brancha sur la fréquence générale :

- FLEETCOM ! Ici groupe d’abordage ! Objectif secondaire impossible à accomplir ! Les machineries du croiseur ont été sabotés et nous n’avons plus de propulsion ! Nous évacuons le vaisseau ! Demandons récupération immédiate !

- Bien compris, spartans. Nous envoyons des Pélicans vous récupérer au niveau des docks avant tribord du croiseur. FLEETCOM, Terminé.

Il ne fallut qu’une dizaine de minute à peine aux spartans pour faire en chemin inverse ce qu’ils avaient mis une heure à sécuriser. Le reste des troupes d’abordage arriva presque en même temps qu’eux aux hangars à navette covenant, bien qu’encombrés par les nombreux blessés accumulés le long des combats. Les Pélicans ne furent pas longs, et vinrent en force pour évacuer les soldats. Lorsqu’ils atterrirent, un lieutenant sortit de l’un d’eux et s’avança vers l’adjudant :

- Spartan-117 ! Voici votre taxi !

John avait l’habitude de suivre les ordres des officiers, mais il sentait bien que ce n’était pas qu’un simple ordre. Si ce lieutenant lui indiquait un Pélican particulier, cela signifiait qu’il y avait une bonne raison. Il suivit l’officier dans l’appareil avec la quelques-uns de ses spartans, et s’aperçut que l’engin était équipé des meilleurs brouilleurs actuels, ainsi que de plaque d’isolation. C’était en fait l’un des nombreux appareils de transport du SRN, utilisé par les personnalités les plus importantes de la Navy pour les trajets secrets.

Un homme était assis sur l’un des sièges. Malgré le fait qu’il porte un simple uniforme de marine, John s’aperçut tout de suite en voyant sa posture qu’il n’était pas qu’un simple soldat. Son regard était sombre, voir agressif. John cru même y voir de la haine. L’homme fumait une cigarette, ce qui était normalement interdit dans un appareil de ce type, et l’adjudant en déduisit que l’individu devait avoir un certain mépris envers le règlement. L’énorme balafre qui lui fendait le visage devait certainement être un maquillage ayant pour but que l’on ne puisse pas le reconnaître, ce qui signifiait qu’il devait avoir un haut grade militaire.

- Adjudant John-117, fit l’inconnu avec un plaisir ironique. Enfin nous nous rencontrons.

- Qui êtes-vous ? demanda John sans sourcilier.

- Mon identité n’est pas nécessaire à notre conversation.

Il fit un signe de main au TCAO qui était posté prêt de l’écoutille, et celui-ci ferma l’accès du Pélican devant les autres spartans. John se retrouva seul avec l’agent du SRN et le TCAO, une compagnie qui ne lui semblait que peu amicale.

- Je vous sais suffisamment intelligent, continua l’agent, pour ne pas tenter de me contredire, ni essayer de me cacher des informations. Je veux un rapport total de votre action sur le vaisseau, ainsi que la raison de votre lamentable échec.

- Notre section a abordé le vaisseau comme prévu, monsieur. Les covenants nous ont opposé une résistance féroce, ce qui a ralenti notre progression. Lorsque nous avons enfin atteint le pont de commandement du croiseur, il semblerait qu’un système d’autodestruction des moteurs s’est déclenché, rendant le bâtiment inutilisable. Voici la raison de notre évacuation.

Le visage de l’homme n’exprima aucune émotion en réponse. Il fit un rond de fumée traduisant son calme et son indifférence face à la défaite actuelle du CSNU.

- Quelles ont été les pertes subies durant l’opération ?

- Nous avons perdu la deuxième section de marines, ainsi qu’une vingtaine de troupes de choc.

- Aucun spartan mort ?

John eut presque un sursaut. C’était presque comme si l’homme souhaitait la mort de ses spartans. L’adjudant se retourna vers le TCAO, qui était toujours au garde-à-vous près de l’écoutille, son casque de combat cachant son visage. Ce soldat devait être un homme de confiance pour que l’agent l’autorise à assister à la conversation. Ou peut-être qu’il faisait parti d’un autre plan.

- Non, monsieur, répondit John. Ma section n’a subit aucune perte, ni aucun blessé.

L’agent n’arriva pas à empêcher une affreuse grimace de s’exprimer sur son visage. John sentit également un mouvement de la part du TCAO. Le spartan se rendit compte subitement qu’il avait oublié de regarder le matricule du soldat, normalement greffée sur son uniforme. Il se retourna une deuxième fois, et s’aperçut qu’il ne portait pas de plaque. Cet homme était donc membre d’une section fantôme, un groupe non recensé par l’administration de la Navy ou du CSNU. John aurait dut s’en douter.

- Bon, fit l’agent. Vous pouvez disposer, adjudant.

John se rendit compte que l’appareil n’avait pas encore décollé. Il se retourna une dernière fois vers le TCAO, qui ouvrit l’écoutille du Pélican, et sortit rejoindre ses hommes qui l’avaient attendu. Au passage, il remarqua que la plaque d’identification du soldat de choc était simplement cachée par un bout de tissu qu’il arracha avec l’agilité d’un félin.

- Caporal Allan Ledge, lut l’adjudant. Vous faisiez parti de l’escouade Ravage sur le croiseur. Maintenant je comprends un peu mieux tout ceci. C’est vous qui avez saboté l’opération.

- Et pourquoi j’aurais fait un truc pareil ? répliqua le TCAO sans broncher mais d’une voix des plus agressives.

- Je me souviens de vous, Allan.

Cette phrase n’avait aucune véracité. John n’avait aucun souvenir de ce visage brulé par la haine, mais il avait une intuition, et il voulait la vérifier. Ses mots semblaient avoir porté ses fruits, car le soldat ne gardait plus son allure droite et militaire, mais était désormais sur la défensive, comme s’il craignait que l’adjudant ne l’attaque.

- Je n’aurais jamais fait ça. Pas même pour venger mes camarades, espèce de monstre.

- Messieurs, intervint calmement l’agent du SRN. Que pensez-vous de régler cela dehors ?

CHAPITRE TREIZE

1613 heures, 17 décembre 2525 (Calendrier militaire). Croiseur destroyer Vengeur, Système Epsilon Eridani, planète Reach, station de défense spatiale Washington.

John contemplait la surface de Reach derrière la baie vitrée de la salle de plaisance. Tous les vaisseaux de la flotte ayant participé à la bataille de Tulsa étaient en orbite, la plupart accrochés aux stations de défense. Cette opération avait été au final une immense défaite. Aucun croiseur ennemi n’avait put être ramené aux chantiers navals de la planète, Tulsa avait été anéantie par les covenants et la flotte du CSNU amputée de nombreux bâtiments de guerres importants qui n’avaient réussi à éliminer que la moitié des vaisseaux ennemis.

Mais tout cela aurait put être évité s’il n’y avait pas eut ce sabotage. L’adjudant ne voyait pas qui au sein de l’état-major avait eut intérêt à ce que cette mission échoue, fut-ce au prix de milliers de vies. L’Humanité était au bord de l’extinction, et elle devait quand même subir des ennemis intérieurs en plus des covenants. John n’avait pas assez d’éléments pour deviner qui avait été son véritable ennemi, et encore moins pour porter une accusation devant le conseil de sécurité du CSNU. Dans quelques minutes, celui-ci allait le convoquer, et il devrait alors leur faire son rapport. Quelles sont les choses qu’il devait avouer ? Il n’avait jamais caché quoi que ce soit à un supérieur, et aujourd’hui il doutait de ce qu’il avait à dire.

- Adjudant ! l’appela un MP en pénétrant dans la salle de plaisance. Ils vous attendent.

John suivit le marine qui le mena à sa grande surprise jusqu’au hangar à navette de la station. L’air de décollage était totalement déserte en apparence, mais John surprit les silhouettes de plusieurs MP dissimulés dans les coins d’ombre de la salle. Le seul appareil amarré dans le hangar était une large navette de classe Shadow, dont le rôle habituel était l’espionnage grâce à son équipement furtif inégalé. Lorsque John pénétra dans l’appareil, il remarqua que tout l’équipement de surveillance et d’écoute qui se trouvait habituellement dans ce genre de navette avait été retiré. A la place se trouvait une longue table de conférence autour de laquelle était assis dans l’ombre une douzaine d’hommes et de femmes, ainsi qu’un large écran et un puissant projecteur qu’on avait dirigé vers l’entrée de l’appareil pour éblouir les arrivants afin qu’ils ne puissent identifier les personnes présentes.

Et effectivement, même avec sa vue améliorée, John ne put distinguer que les silhouettes de ses interrogateurs. Il se mit au garde-à-vous, mais personne ne lui renvoya son salut. La voix de l’un d’eux, probablement le grand homme qui se tenait en bout de table, commença la séance :

- Repos, adjudant.

John pris une pose plus détendue. Bien qu’il ne porte plus son armure depuis la fin de la mission, sa carrure imposante ne permettait aucun doute sur sa nature pour quelqu’un ayant connaissance du projet spartan. Le regard pointé vers le haut pour diminuer l’éblouissement du projecteur, il répliqua :

- Spartan 117 au rapport, messieurs.

- Nous avons déjà visionné les archives vidéos de votre mission durant l’opération Tulsa, adjudant, continua l’homme. Vous nous avez fourni une importante quantité d’information à étudier, mais nous désirions revenir sur plusieurs points de votre mission avec vous. Je vous rappel que vous pourriez passer en cour martiale si vous ne répondez pas en toute honnêteté à nos questions ou si vous omettez des détails importants.

John senti la tension monter en lui. La caméra embarquée de son armure avait probablement enregistré sa discussion avec l’agent du SRN, ce qui signifiait qu’il ne pouvait pas cacher ceci. Mais il ignorait encore comment il allait présenter cet entretient involontaire. Il se contenta de répondre :

- Je le sais, monsieur. Je répondrais au mieux de mes capacités.

- Lecture des scènes quinze à dix-huit, s’il vous plaît, demanda une voix de femme.

L’écran au fond du ventre de l’appareil s’alluma pour diffuser l’enregistrement que l’adjudant avait pris de l’ascenseur gravitationnel du croiseur covenant, ainsi que la foule de grognards qui se diffusait dans les rues de Permia. John reconnu en bas de l’image le numéro d’identification de la caméra de son armure. L’image se figea soudain, puis zooma sur l’ascenseur gravitationnel.

- Vous avez emprunté ce système pour pénétrer à l’intérieur votre cible, continua la voix de femme. Nous aimerions connaître votre avis sur la technologie qui le constitue.

- J’ai remarqué que mes spartans et moi étions plus rapidement transportés par ce rayon que le reste des troupes d’abordage. Je suppose donc qu’il s’agit d’un système de traction magnétique. Mais seule la moitié du rayon pouvait nous transporter jusqu’au vaisseau, l’autre moitié semblant nous cloué au sol car la gravité y était double.

- Serait-ce possible qu’il s’agisse de courants de convection électromagnétiques ? supposa un homme en s’adressant à la femme.

- Possible. Les covenants seraient donc capables de diriger les champs de forces magnétiques.

- Cela expliquerait comment ils guident leurs torpilles à plasma dans l’espace, ajouta une nouvelle voix.

- Nous en débattrons plus tard, conclu l’homme au bout de la table. Adjudant ! Nous aimerions que vous nous apportiez des renseignements sur un point étrange de votre mission. Lecture des scènes quatre-vingt douze à quatre-vingt quinze !

L’image du Pélican dans lequel John avait rencontré l’agent du SRN remplit soudain l’écran. A ce moment de la vidéo, l’adjudant était encore avec ses hommes dans les docks du croiseur covenant, et au moment où il entra dans le Pélican, l’image se remplit brusquement de parasites, ainsi que le son enregistré. On ne pouvait absolument rien distinguer, aussi bien sur l’écran que dans le chaos de friture qui s’échappait désormais des haut-parleurs.

- Arrêt ! ordonna l’homme. Adjudant, nous avons là six minutes trente-quatre de vidéo complètement inutilisable. Nous aimerions connaître la raison de cette défaillance momentanée de votre équipement, ainsi que ce qui s’est passé durant cette séquence.

John considéra la situation un instant. S’il leur disait la vérité, le croiraient-ils ? Et si l’agent qu’il avait rencontré était parmi eux, et que cette question soit un test ? Comprenant l’embarras dans lequel il se plongeait, le spartan expliqua :

- Ce Pélican était équipé de nombreux systèmes d’isolation et de furtivité. Apparemment, il disposait également d’un équipement de brouillage qui a rendu ma caméra aveugle et sourde durant le temps où je m’y suis trouvé. A l’intérieur se trouvait un homme qui a refusé de s’identifier. Il a exigé que je lui fasse mon rapport de mission, ainsi que je lui donne la liste des pertes subie durant l’opération par mon équipe, ce que j’ai fait.

- Pourquoi ?

- Il m’a semblé évident qu’un homme disposant d’un appareil de ce type ne pouvait être qu’un agent du SRN ou d’un haut grade, ayant tout pouvoir sur moi et sur mon équipe. Mais je voudrais porter votre attention sur un autre élément de cette scène : il y avait avec cet homme un TCAO, dont la plaque d’immatriculation était cachée mais que j’ai découverte. Il s’agissait du caporal Allan Ledge, membre de l’escouade Ravage qui faisait partie des troupes ayant abordé le croiseur avec mon équipe. Pour plusieurs raisons, je soupçonne ce soldat d’avoir saboté la mission en faisant exploser une bombe au niveau des moteurs du croiseur.

Tous les membres du conseil de sécurité s’agitèrent subitement et commencèrent à murmurer chacun de leur côté. Mais l’homme au bout de la table n’avait pas bronché, et il fit faire le silence avant de s’adresser à John :

- Saisissez-vous la portée de votre accusation, adjudant ?

- Oui monsieur, je comprends parfaitement. Mais vous m’avez vous-même demandé d’être pleinement honnête.

- Et quelles sont les raisons de cette accusation ?

- J’ai déjà rencontré cet homme il y a dix-sept ans sur le porte-vaisseaux Atlas. A la suite d’une dispute, et sous les ordres d’un sergent, j’ai engagé un combat à main nue contre lui et trois autres TCAO de sa section de l’époque. Ses coéquipiers n’ont malheureusement pas survécu à l’affrontement, et il s’en est sorti avec de nombreuses blessures graves qui ont put être soignées.

- Vous voulez dire que l’échec de votre mission serait dû à une vendetta personnelle de la part de ce soldat ?

- Non. Mais je crains que quelqu’un se soit servit de la volonté de vengeance du caporal pour ruiner l’effort de mes hommes et moi.

- Que je sache, intervint presque à mi-voix un autre homme, vous n’avez pas investi ce vaisseau tout seul.

- Colonel, intervint l’homme du début, veuillez garder votre calme. Adjudant ! Votre accusation a besoin de justifications.

- Monsieur, vous devez comprendre que le caporal Ledge ne pouvait pas accomplir ce sabotage sans une aide de haut rang. Il était formellement interdit d’amener des explosifs sur le vaisseau ennemi, ce qui signifie un soutient en équipement. De plus, pour placer les charges sans…

Soudain, l’écoutille d’entrée de l’appareil s’ouvrit derrière le spartan, et un homme entra. C’était un agent de la Navy, portant une feuille de papier. Il avança sans hésiter vers l’homme qui se tenait au bout de la table de réunion, et lui tendit le document en silence avant de sortir. Un long silence régna dans la pièce avant que l’homme relève les yeux vers le spartan pour annoncer :

- Adjudant, il semble que vos accusations soient sans fondement. J’ai ici la fiche du caporal Ledge. Sa présence durant l’opération Tulsa est impossible car il est mort.

John ne put réprimer un haut-le-cœur, ainsi qu’un regard de surprise non dissimulé.

- Mort ? répéta-t-il. Comment ? Quand ?

- Vous l’avez tué.
CHAPITRE QUATORZE

0826 heures, 20 décembre 2525 (Calendrier militaire). Système Ceta Ravernis, planète Renarc, cité de Vernia.

Le temps était maussade au-dessus de la ville dans les rues de laquelle peu de gens se promenaient, et la pluie n’allait pas tarder à tomber. Monsieur Steve Magan marchait à pas lent à travers le parc, prenant son temps pour observer l’espace qui, avec le manque de luminosité, était devenu morne et ennuyeux.

Les premières gouttes commencèrent à tomber lorsqu’il atteignit la fontaine centrale, constituée d’une statue imposante représentant un aigle aux airs menaçant engagé dans un duel de regard avec un énorme serpent, des jets d’eau entourant les deux animaux de façon harmonieuse. Steve eut un certain dégoût pour la sculpture et continua à avancer sans plus y faire attention. C’est alors qu’il aperçut un homme assis sur un banc, semblant regarder partout et nul part à la fois, et Steve avança vers lui de façon résolue.

- J’espérais échapper à la pluie, annonça l’homme, mais apparemment vous avez trainé en route.

- Peu m’importe que vous soyez trempé en rentrant faire votre rapport. Qu’en est-il, finalement ?

- Le conseil de sécurité a attribué l’échec de la mission au manque de connaissances sur les systèmes de sécurité covenants. Il ne leur semble pas impossible que leurs vaisseaux possèdent des charges d’autodestruction préventives, et l’adjudant a donc été déchargé de la responsabilité de cette défaite.

- Y aura-t-il une nouvelle mission de ce genre ?

- Non. L’état-major sait parfaitement qu’on ne pourrait pas berner deux fois les covenants de la même manière. Il n’y aura pas d’autres tentatives, en tout cas pas avant des mois. Votre mission a donc été menée à bien.

- Mais les spartans s’en sortent sans une perte et sans être réprimandés par le conseil de sécurité, s’exclama Steve. Je voulais qu’ils payent !

- On ne peut pas tout avoir, répliqua l’homme avec un maigre sourire. Vous avez déjà de la chance que l’adjudant n’ait pas put donner la preuve de votre présence durant la mission. Si l’existence des commandos fantômes était découverte, notre employeur aurait de gros problèmes et n’hésiterait pas à nous sacrifier pour garder son poste au sein de l’amirauté.

Steve ne put réprimer un grognement tout en baissant pensivement les yeux. Son employeur faisait toujours passer ses propres intérêts avant tout le reste. La défaite de Tulsa aurait put être une immense victoire, donnant au CSNU une technologie de pointe et de meilleures connaissances des covenants. Steve ne connaissait pas les motivations de son employeur, et préférait ne pas les connaître, mais quel qu’elles soient, elles étaient fortes. On ne jouait pas contre son camp dans une opération aussi importante sans avoir des cartes maîtresses dans son jeu. Mais cela n’était plus le problème de Steve. Il avait tenté de se venger, et il n’en avait tiré que plus de haine contre les spartans.

Maintenant, il ne pouvait plus agir. Il avait eut sa chance et il avait échoué, ne donnant à son commanditaire que ce que celui-ci avait demandé en priorité : un échec de la part des spartans, une fausse preuve allant contre leur réputation de combattants parfaits. Il avait sali leur réputation sans pouvoir en tuer un seul. L’ancien caporal se dit alors qu’il aurait peut-être dû accepter d’affronter l’adjudant en face-à-face, même s’il savait qu’il n’aurait eut aucune chance. Il aurait peut-être même été tué, et aurait offert une preuve contre son employeur et ses manipulations, mais au moins il l’aurait combattu une seconde fois. Au lieu de cela, il était resté dans la navette, laissant le spartan à sa rancœur et son impuissance face à sa première défaite.

- Je vous envie, avoua l’homme. Etre à la retraite si tôt, loin de la guerre, avec une nouvelle identité, c’est un luxe que peu de personne peuvent s’offrir.

- C’est la récompense des morts, fit Steve ironiquement.

L’ancien soldat revit soudain le jour où il avait rencontré le son employeur pour la première fois. C’était le jour où ses camarades avaient été tués par l’adjudant, et il sortait à peine de l’inconscience lorsque l’officier s’était penché sur lui pour lui annoncé : « mon cher, vous avez été officiellement tué par l’adjudant spartan John-117. Bienvenu dans la section fantôme ! ». Il n’oublierait jamais ce sourire qu’avait esquissé l’homme en prononçant ces mots, riant à l’avance des tracas qu’il allait pouvoir causer aux super-combattants de la section Trois en l’utilisant comme un pion.

Steve regarda une dernière fois l’homme avec mépris et lâcha avant de s’en aller :

- Dites au colonel qu’il peut se vanter de m’avoir fait croire que j’aurais ma revanche.

FIN

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